Prison préventive pour le moniteur du Lycée français de Barcelone

Le juge d’instruction de l’affaire d’abus sexuels présumés sur mineurs au Lycée français de Barcelone (LFB) a ordonné ce jeudi la prison préventive pour le principal suspect. Samuel R.* sera placé dans une section carcérale adaptée à sa condition de personne légèrement handicapée.

Arrivé une heure avant sa convocation pour éviter les journalistes, Samuel R. était aujourd’hui vêtu d’un sweat orange, l’une de ses tenues fétiches souvent décrite par les fillettes ayant déposé les deux premières plaintes. Depuis, deux autres enfants ont signalé le moniteur de cantine, employé par le sous-traitant Serunion et affecté à la maternelle Munner du LFB depuis trois ans.

Lundi 29 mai, la partie civile et le parquet avaient réclamé la détention provisoire en raison d’un fort risque de fuite compte tenu des lourdes peines encourues ainsi qu’une probabilité de récidive. Le juge s’est basé sur les déclarations des quatre enfants, victimes présumées d’une série d’abus sexuels, dont attouchements et pénétrations qui avaient lieu durant la pause déjeuner. Il a également pu s’appuyer sur des enregistrements audios de conversations entre parents et enfants, accablants pour le mis en cause.

Samuel R. travaillait deux heures par jour au LFB, de 12h à 14h. Assez selon le juge pour commettre une longue liste de méfaits décrits dans la décision du tribunal.  Affecté par un léger retard mental, il n’échappe toutefois pas aux mesures préventives. Le magistrat considère que la façon dont le moniteur a abusé des enfant prouve qu’il « connaissait la portée morale de sa conduite ». Le tribunal fait par ailleurs remarquer que la reconnaissance de son handicap à 33% de la part du ministère des Affaires sociales du gouvernement catalan date de 2009. Il a demandé à la défense de produire des certificats médicaux récents décrivant la situation médicale de Samuel R. ou d’éventuels traitements médicaux prescrits au mis en cause. La défense n’a pu apporter aucun de ces documents.

Lieu de vie, caractère : le portrait du principal suspect

Un coup dur pour la défense, dont la stratégie se basait, jusqu’ici, sur la reconnaissance de ce handicap. De fait, le suspect s’est refusé à répondre aux questions de l’instruction avant toute expertise psychologique. Une expertise qui a été menée ce matin et a déterminé que l’individu présentait un retard mental, qui ne l’empêchait toutefois pas d’être jugé ni placé en détention provisoire. Selon des sources judiciaires, l’expert psychologique a eu « pitié » du jeune homme, nerveux, timide et d’apparence inoffensive. Un portrait qui rappelle la description réalisée par ses voisins et autres habitants de son quartier.

Car de l’autre côté de la ville, dans les rues de Sant Andreu, c’est surtout la gaîté de Samuel R. qu’on retient. « Il sourit souvent », racontent deux caissiers du Lidl de la Rambla. Il faut dire que l’homme de 31 ans ne passe pas inaperçu, avec ses lunettes de soleil dans les cheveux, sa silhouette grande et menue, et ses bras dessinés illustrant sa passion pour le basket.

Sur son compte public Instagram, il se définit d’ailleurs comme sportif. Et dans ses vidéos Tik-Tok – dont la publication se voulait mensuelle jusqu’au mois de mars, période où la première plainte a été déposée -, plusieurs trophées ornent les étagères de son domicile, ou sa chambre d’enfant.

Un enfant dans un corps de grand

Car s’il existe un univers à associer à cet homme, qui fêtera ses 32 ans l’été prochain, c’est probablement celui des enfants. Déguisements Peter Pan, Spiderman. Fêtes de carnaval et Halloween. Vidéos de danse façon ados. Photos devant des affiches de comédies musicales, et fascination pour Michael Jackson illustrent un possible agresseur intéressé par le monde infantile. Secteur vers lequel il se serait tourné professionnellement. Après s’être cherché une voie auprès des animaux, en suivant une formation d’auxiliaire vétérinaire dans une école de Sant Andreu pendant un an, Samuel R. a troqué une blouse verte pour un uniforme orange floqué Lycée français de Barcelone.

sant andreu comerc carrer 1003211Selon les familles des victimes, il travaillait en tant que moniteur de cantine au Lfb depuis « au moins cinq ans ». D’abord à Pedralbes puis à la maternelle. Un poste de surveillant d’enfants sur le temps du déjeuner, qui, d’après son employeur direct Serunion, ne demandait aucune formation spécifique, bien que « les études liées à l’éducation soient valorisées ».

Dans l’établissement barcelonais, les plaintes parlent de masturbations, pénétrations et attouchements sur plusieurs enfants de l’école maternelle dans les toilettes de la cour de récréation, située à côté de « la villa du directeur ». Pour taire la parole des victimes, Samuel « menaçait les enfants de poser une bombe dans l’école ou de tuer leur mère », selon la première petite fille qui a libéré sa parole sur celui qu’elle appelait « Monsieur puant ». Autant d’intimidations soupçonnées qui semblent inimaginables, d’après les souvenirs des membres de son ancienne école vétérinaire. « Il était très doux, très bien avec les animaux, toujours très correct. Nous n’avons eu aucun problème avec lui », déclare la directrice. « C’est un enfant dans un corps d’adulte, mais il est très gentil ». Selon elle, Samuel vivrait encore chez ses parents, dans un périmètre proche de la station de métro Fabra i Puig, à Sant Andreu. Un quartier qu’ils habiteraient depuis plusieurs années, à en croire les dernières données publiques sur les réseaux sociaux.

Le suspect est désormais placé en détention provisoire, mais son avocat peut faire appel de la décision.

*par respect de la présomption d’innocence, Equinox occulte le nom de famille.

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