La pandémie de Covid-19 a démocratisé le télétravail. Désormais, à l’arrivée des beaux jours, nombreux sont les Français à choisir Barcelone afin d’exercer à distance pour une société française. Quels sont leurs droits ?
Photo : Clémentine Laurent Photographie
Quelles sont les conditions du contrat d’un télétravailleur français installé en Espagne, exerçant pour une entreprise française ?
Un salarié est en mesure de télétravailler légalement en Espagne pour une entreprise basée en France. Il relèvera toujours du régime français à une condition : bénéficier d’une situation de détachement. Il faudra ainsi que l’employeur ait formulé, à titre exceptionnel, le maintien de son rattachement au régime français.
En conséquence, la rédaction d’un avenant de télétravail sera nécessaire. Cet avenant, bien que soumis au droit français, ne devra pas contredire les lois de travail espagnoles, notamment les règles impératives de protection minimale du droit du travail en Espagne.
En quoi consiste le « détachement » ?
Le détachement implique qu’un employeur établi dans un pays, par exemple en France, envoie temporairement un salarié pour travailler dans un autre État, par exemple l’Espagne. Durant cette durée, la législation sociale de l’État habituel d’activité (ex : la France) reste applicable au salarié à certaines conditions.
Pour l’employeur :
- il doit garder un lien de subordination avec son salarié (lien contractuel);
- en envoyant son salarié dans un autre pays, l’employeur doit poursuivre normalement ses activités en France,
- L’employeur ne doit pas remplacer en France le poste du salarié détaché.
Pour le salarié :
- il doit obligatoirement être un ressortissant d’un État membre de l’Union européenne (ex : France ou Espagne)
- le salarié peut être un individu recruté en vue d’être détaché, c’est-à-dire travailler à l’étranger et maintenue au régime français si elle est, antérieurement à son embauche, soumise à la législation française depuis au moins 1 mois (art. 14, § 1 du règlement. 987/2009 et Décision A2 du 12 juin 2009 CACSSS).
À quel régime fiscal le télétravailleur dépend-il ?
En cas de détachement d’un salarié, le maintien de celui-ci au régime français de protection sociale est de droit, mais sous certaines conditions. Si tous les critères du détachement ne sont pas réunies, des accords exceptionnels peuvent être conclus. Dans les deux cas, les cotisations et contributions continuent d’être versées en France, ce qui affranchit l’employé du paiement des cotisations de sécurité sociale dans l’État où il est détaché (ex : Espagne).
Comment le salaire du télétravailleur est-il imposé ?
Un expatrié français sera perçu comme résident fiscal espagnol après avoir vécu de façon continue dans la péninsule ibérique pendant plus de 183 jours. Néanmoins, l’Espagne ne permet pas de diviser l’année fiscale si bien que la détermination de la résidence vaudra pour toute l’année concernée. En somme, dès lors que le télétravailleur s’installera en Espagne après le 2 juillet d’une année (par exemple : 2023), il conservera sa résidence fiscale française jusqu’au 1er janvier de l’année suivante (2024).
Pendant la période où la résidence fiscale demeure française, l’impôt applicable sera l’Impôt sur le Revenu des Non-Résidents (IRNR) et l’employeur devra retenir 19 % de chaque salaire pour les verser comme acomptes à l’administration fiscale espagnole.
Lorsque la résidence fiscale devient espagnole, l’employeur reste obligé de déclarer et de procéder à des retenues, mais cette fois au titre de l’Impôt sur les Revenus des Personnes Physiques (IRPF). Le taux de rétention devra alors être établi selon le barème fiscal en vigueur et de l’estimation des salaires qui seront versés tout au long de l’année.
Quid de la sécurité sociale du télétravailleur ?
Lorsqu’un employé exerce son activité en télétravail en Espagne pour un employeur français, il relève automatiquement du régime de sécurité sociale française. Une mesure découlant du guide pratique sur la législation applicable dans l’Union européen. Il y est écrit qu’en vue « d’encourager dans toute la mesure du possible la liberté de mouvement des travailleurs et des prestataires de services, d’éviter d’inutiles complications administratives ou d’une autre nature, coûteuses et contraires aux intérêts des travailleurs, des entreprises et des administrations, les dispositions du droit de l’Union en vigueur prévoient certaines dérogations au principe général précité ». La principale de ces dérogations concerne ainsi l’obligation de maintenir un travailleur détaché dans le régime de sécurité sociale de l’État membre dans lequel l’entreprise qui l’emploie, par exemple la France pour une boîte française, exerce normalement ses activités lorsque le travailleur concerné est détaché par cette entreprise dans un autre État membre (par exemple l’Espagne) pour une durée déterminée dès le départ, soit vingt-quatre mois au plus.
Avant le départ du salarié, l’employeur doit informer les organismes compétents, soit la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) si le salarié relève du régime général, soit la Mutualité Sociale Agricole (MSA), si l’employé dépend du régime agricole, en précisant la nature de la mission, le lieu où il va exercer et le nom ainsi que les coordonnées postales de l’entreprise. Cette démarche permet l’acquisition d’une attestation de la législation applicable au salarié, appelé formulaire A1, qui a remplacé le formulaire E101.