Antibiotiques, paracétamol pour enfants, insuline. La chasse aux médicaments à Barcelone dure depuis plusieurs mois. Et pour trouver les précieux remèdes, les pharmacies montent la garde, forment un réseau et cherchent des alternatives.
Photo : Clémentine Laurent
« L’homme qui vient de sortir, à l’instant, n’a pas pu avoir son médicament », annonce Ruben, derrière le comptoir de la pharmacie Girona 72. A Barcelone, les croix sont bel et bien vertes mais à l’intérieur les stocks virent au rouge. Antibiotiques, insulines, et paracétamol. « On manque un peu de tout, surtout pour les enfants. Tous les jours, il y a quelque chose de différent. Parfois même, il faut retourner chez le médecin pour changer d’ordonnance », ajoute Judith, de la pharmacie voisine située rue de la Diputació, qui chiffre le nombre de remèdes manquants à 400.
Mais c’est en réalité plus encore. Selon le média français Le Monde, 672 médicaments sont actuellement en rupture de stock dans les officines espagnoles. Si la situation n’est pas inconnue des pharmaciens barcelonais, tous sont unanimes : c’est la première fois qu’elle est si forte. Qu’elle dure depuis trois mois (au moins). Et qu’elle est aussi imprévisible. « On ne peut jamais savoir lorsqu’un patient nous demande un médicament si on l’a », se désole Victor, alors qu’il enfile sa blouse blanche, place Sant Pere.
« Le médicament est très économique »
Les raisons ? Inconnues. « Ils ne disent rien. Personne ne sait. » Mais les suppositions donnent plutôt l’avantage aux coûts de fabrication, de transports, à une production qui ne suit plus la demande, ou encore au manque de matériel. Il suffit parfois d’un tube ou d’un petit contenant absent pour bloquer un processus long de deux ans. « Concrètement, il y a deux fois moins de production comparé à l’an passé », estime l’expert du Born.
Pourtant, l’Espagne possède des laboratoires. Elle est en capacité de produire de la médication pour son propre pays. « Mais je suppose qu’ils gagnent plus à produire pour d’autres et à les envoyer ailleurs, plutôt qu’ici, renchérit Judith. Ce n’est pas rentable pour eux. L’univers du médicament est très économique. » Preuve en est, les précieuses boîtes rangées dans les tiroirs des pharmacies viennent des quatre coins du continent, voire même du monde.
Les pharmacies de Barcelone en réseau
Face à cette crise, les apothicaires ont dû se retrousser les manches et monter la garde. Ils sont de plus en plus nombreux à s’inscrire à un tout nouveau réseau : FarmaHelp. « Si on n’a pas le traitement recherché, alors on peut s’écrire entre nous. Une pharmacie fait signe et le réserve pour le patient. En général, c’est très réactif », expliquent Ruben et ses collègues, qui détiennent plus de 20 ans de carrière. S’en suit alors une petite chasse au médicament à travers les rues de la capitale catalane.
Et dans le cas où le précieux remède serait introuvable, le pharmacien devient presque magicien. « La règle, c’est de chercher un substitut, avec les mêmes effets et quasiment le même prix, ajoutent-ils. Actuellement, on n’a plus de pastilles effervescentes, mais on a des comprimés, par exemple. Mais en réalité, souvent, ce sont les patients qui refusent. »
Hors de question toutefois de changer le médicament prescrit. S’il s’avère réellement introuvable, alors le patient doit retourner à la case départ : chez son médecin. Mais à cœur vaillant rien d’impossible. D’autant que dans la rue Girona, on le clame : « personne ne reste sans médicament. En cas d’urgence, il y a les hôpitaux. On trouvera toujours ».
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