Pourquoi être parti ? Avoir quitté sa famille ? Pour faire la fête et être en vacances, n’est-ce pas ? Ces questions ne sont pas à l’abri de refaire leur apparition lors des repas de famille de fin d’année. Alors pour les expatriés incompris, voici un petit guide pratique.
Ça y est, le mois de décembre connaît ses premiers jours, et les fêtes de fin d’année approchent à grands pas. Synonymes de retour en France pour les expatriés. Des repas de famille, des retrouvailles des parents, grands-parents, oncles et tantes. Et puis aussi, des questions ou remarques.
« Pourquoi es-tu parti ? », « C’est pour les vacances de toute façon », ou encore, « alors, ça se passe bien la fête ? ». Des signes d’incompréhension, ou plutôt d’appréhension tout à fait normaux, selon Agathe Fourgnaud, psychothérapeute française à Barcelone. Alors pour éviter de gâcher l’ambiance, elle donne quelques explications et conseils. Histoire de bousculer les mœurs, tout en douceur.
Pourquoi certaines familles ne comprennent pas l’expatriation ?
Qui dit éloignement dit distension possible des liens. Il est moins facile de se voir et la spontanéité des relations se perd. Il n’est pas toujours aussi facile de sauter dans un train, dans un avion, ni même dans sa voiture. De fait, on participe moins au quotidien de ses proches.C
C’est aussi une question de générations : les précédentes étaient plus enracinées, moins mobiles, on quittait sa ville, son pays, si on y était contraint. Aujourd’hui, elles sont plus nomades, habituées à passer d’un pays à l’autre pour leurs études et leurs loisirs, raisonnent souvent en termes de qualité de la vie. Les proches de ceux qui partent vivent l’expatriation ont des réactions confuses. Ils se réjouissent pour eux, tout en étant tristes de les voir s’éloigner.
Comment leur expliquer ?
Le mieux est d’en parler sans faire semblant que rien ne change. On a la chance aujourd’hui de rester reliés via la technologie, mais se parler et se voir via des écrans interposés ne remplace pas la présence réelle. Il faut prendre le temps d’entendre les arguments de ceux qui restent et qui redoutent d’être un peu oubliés. Et aussi, les faire participer à cette nouvelle aventure autant que faire se peut. En les invitant à venir à Barcelone par exemple.
Que répondre à ceux qui pensent que les expatriés sont à Barcelone en vacances et pour faire la fête ?
Les clichés ont la vie dure ! On travaille beaucoup plus en Espagne qu’en France où l’on vit au rythme des trente-cinq heures. Sans compter les 15 jours de congés scolaires toutes les cinq semaines. A Barcelone, les gens n’ont pas peur de bosser, mais ils savent aussi prendre le temps de vivre.
Les Français qui viennent à Barcelone sont bluffés par l’énergie de la ville et par la manière dont elle bouge, bluffés aussi par la qualité de ses équipements. Voilà ce qui saute aux yeux des Français
Que dire à ceux qui pensent que l’Espagne est un pays arriéré ?
Encore un cliché qui existe encore. Alors qu’il remonte à l’époque où l’Espagne, pour des raisons politiques, n’a pas pu se développer comme le faisait la France durant les Trente Glorieuses.
Maintenant, c’est plutôt l’inverse. Depuis 20 ans, la France décline alors que l’Espagne se porte bien, même mieux que sa voisine. Que ce soit en termes d’éducation, de santé, de sécurité ou de qualité de vie. En consultation, je reçois régulièrement des Français qui ont vécu un peu partout dans le monde et qui, à l’heure de se ré-enraciner quelque part, choisissent Barcelone. Pour ceux-là, Barcelone serait un peu la France… en mieux.
Comment réagir face au sentiment d’abandon ?
Il est légitime car les expatriés sont plongés dans un quotidien qui est tout autre, et dans lequel les parents se sentent isolés. Ceux qui vivent ici ont simplement l’impression d’être en France, en mieux, car les pays sont à côté. Mais les parents associent Barcelone au mot « étranger ». Il y a encore la dimension psychologique de la frontière.
Pour remédier à ça, il faut compenser l’éloignement avec une organisation en béton de manière à se projeter dans un temps de rencontre. Accorder les calendriers des vacances de chacun, pour savoir quand les parents verront leurs enfants et petits-enfants.