Le goût du travail a changé en Espagne, comme en France. Mais d’un côté ou de l’autre de la frontière, les nouvelles attentes des travailleurs divergent. Alors, pour quelles contreparties les Espagnols ou les Français sont-ils encore motivés à travailler ?
Photo : Clémentine Laurent
« Pour ce salaire ? Certainement pas. » Combien de fois les recruteurs l’ont-ils entendu ? La pandémie de Covid-19 a généré une seconde épidémie. Celle de la flemme. En France, notamment, le goût du travail se perd. Fatigués, les Français montent d’ailleurs sur le podium des plus démotivés, avec un travailleur sur trois concerné, chiffre l’enquête d’opinion de l’Ifop. Et en réalité, ils ne sont pas tout à fait les seuls.
La pandémie de Covid-19 a provoqué plusieurs changements de vie. Et l’Espagne n’est pas épargnée. Si les Français valorisent désormais leurs loisirs, les Espagnols, eux, pensent à leur porte-monnaie. « On sait que les travailleurs sont nombreux à vouloir changer de boulot. Et généralement, c’est pour une question de salaire. Ils recherchent une meilleure rémunération », explique Patricia Herencias Gómez, chargée de communication du groupe Adecco en Espagne.
En cause ? L’inflation et la crise énergétique, difficilement vécue en Espagne. Moins de la moitié des Espagnols se dit satisfait des salaires perçus. « Je ne suis pas sûre que ce soit une question d’heures travaillées », analyse la chargée de communication d’Adecco. Selon l’enquête de la société d’intérim, 63 % des travailleurs espagnols souhaitent, pour le moment, garder leur emploi.
Le travail, plus important pour les Espagnols
Aussi parce qu’en Espagne, la place du travail reste plus importante que la vie privée, selon un rapport de Sodexho Alliance, réalisé en collaboration avec la Commission européenne, l’Unesco et l’OMS. Les Espagnols feraient d’ailleurs partie de ceux qui consacrent le plus de temps de leur vie à leur boulot.
L’ambiance n’est pas tout à fait la même de l’autre côté de la frontière, où seulement 39 % des Français comptent rester dans leur entreprise. Eux s’avèrent être les moins satisfaits de leur vie professionnelle, par rapport au reste du monde. Et pour cause, selon l’étude d’Ifop, le travail n’est « très important » que pour 24 % des Français. 32 ans plus tôt, ce taux s’élevait à 60 %.
Une chute liée, là aussi, mais à des problèmes de salaire voire de surcharge de travail. En conséquence ? Un phénomène mondial de renoncement au travail, de pénurie de salariés et de démissions sans expliquer leurs nouvelles attentes. Car oui, elles ont bel et bien évolué.
Des attentes différentes selon la nationalité
Que ce soit en Espagne comme en France, l’équilibre entre vie pro et vie perso prend de l’ampleur. Mais là où les choses divergent entre les deux pays, d’après les chiffres, c’est dans la conception du monde travail. Au-delà du salaire, il existe de grandes différences. Pour les travailleurs espagnols, « l’ambiance de travail compte autant que le salaire », rapporte l’agence espagnole Adecco.
Quand, en France, pour des raisons peut-être historiques, c’est surtout le temps personnel qui prédomine. Après tout, les Français sont « célèbres pour leur sacro-saintes grandes vacances, leurs déjeuners à rallonge, et leur semaine de 35 heures », ironise le journal anglais Télégraph.
En clair, c’est le casse-tête parfait pour les directeurs des ressources humaines. Elles doivent désormais composer avec un salaire revalorisé, une bonne ambiance de travail et un temps personnel à l’avantage du salarié. Même si pour l’instant, en Espagne, la situation reste un peu plus facile. Question de motivation.