Résistante aux températures extrêmes et peu gourmande en eau, la pistache attire de plus en plus les agriculteurs en Espagne, et depuis peu en Catalogne. Sur un marché où le prix et la demande explosent, le pays est devenu le premier producteur européen de pistaches, dont la culture est particulièrement adaptée au changement climatique.
Avec des sols arides, un climat rude et des pénuries d’eau de plus en plus fréquentes, la sécheresse aggrave toujours plus l’état de l’agriculture en Espagne. Nombres d’exploitants se retrouvent depuis une dizaine d’années dans une situation financière difficile en raison de rendements sur le blé, l’orge ou encore l’olive, largement diminués.
Une culture cependant ne pâtit pas de ces conditions, c’est celle de la pistache. Au contraire, ce sont dans ces conditions extrêmes que ce fruit se développe le mieux. « Là où je cultivais auparavant du blé, j’ai planté des pistachiers. C’est beaucoup plus intéressant que les céréales, ces plantations requièrent peu d’eau, sont très résistantes aux maladies, et rapportent beaucoup!» se réjouit Pedro, agriculteur dans la province de Lérida, à 150 kilomètres à l’est de Barcelone.
Peu d’entretien, beaucoup de bénéfices
Ainsi, en 7 ans, la surface de terres consacrées à la pistache a été multipliée par 3 en Catalogne « C’est une culture qui reste minoritaire au sein de notre région, mais qui a considérablement augmenté ces dernières années. Et avec le changement climatique, il est probable qu’elle joue un rôle de plus en plus important » explique la porte-parole du ministère catalan chargé de l’Action climatique et l’alimentation.
Alors, de nombreuses reconversions de la vigne vers ce fruit sec se sont faites depuis 2015, notamment suite à un accord signé par la Generalitat, prévoyant d’atteindre les 500 hectares de terres dédiées à la pistache. Un objectif largement atteint puisqu’en 2022, cette culture est présente sur 898 hectares en Catalogne. « En plus de permettre de hauts rendements, elle demande peu de main d’œuvre durant la phase de récolte. Donc on peut se faire une marge de bénéfice encore plus importante » souligne Pedro, qui a investi dans la pistache il y a 6 ans.
Au-delà des retombées économiques, ce nouvel « or vert » a permis de redynamiser des territoires ruraux abandonnés par des agriculteurs qui ne parvenaient plus à vivre de leur activité. Pourtant, se lancer dans la culture de la pistache peut être un pari risqué.
Un marché très rentable, mais difficile d’accès
Avec des coûts de production bas et une forte résistance aux températures extrêmes, la pistache apparait comme l’alternative idéale aux vignes ou aux oliviers. Mais de nombreux obstacles limitent de fait la mise en culture de nouveaux pistachiers, et donc la probabilité que l’on se retrouve sans céréales cultivées en Espagne et en Catalogne à l’avenir.
« Il faut attendre entre 4 et 6 ans pour que l’arbre produise des fruits, et jusque 8 ans pour que les rendements soient au maximum de leur capacité » explique Leandro, associé de Pedro. « Il faut investir en moyenne 30 000 euros par hectare au début. La pistache est certes très rentable, mais seulement à moyen terme. Donc tout le monde ne peut pas s’y mettre » poursuit cet ancien vigneron reconvertit dans la pistache. Avec 147 exploitations dédiées à la pistache et 450 tonnes annuelles récoltées en Catalogne, « l’or vert » est en plein essor dans la région.
Valorisée pour ses bienfaits nutritionnels et pour sa faible consommation d’énergie, la pistache remplit ainsi toutes les cases du fruit parfait, bon pour la santé et pour la planète. Avec une demande qui explose en Europe, l’Espagne a su se positionner en tête de ce marché d’avenir, où producteurs, consommateurs et territoires y trouvent leur compte.