Après plusieurs années passées à Barcelone, un expatrié français peut-il vraiment se sentir Barcelonais ? Témoignages.
Photo : Clémentine Laurent/Equinox
Au fil des années, certains expatriés français à Barcelone ont fini par adopter le mode de vie de la capitale catalane. Une situation telle, que pour ces Français, la cité comtale est devenue leur « chez-soi ». C’est le cas de Marie, une Sétoise de 48 ans installée à Barcelone depuis 2011. Avant de rejoindre la capitale catalane, Marie a d’abord vécu à Gérone. « J’ai passé 11 ans à Gérone, j’y suis allée par amour, puis j’ai trouvé un emploi là-bas. Pourtant, je voulais m’installer initialement à Barcelone. J’y avais fait mes études et j’ai toujours eu le sentiment que ma place était ici » affirme-t-elle. Dès lors, la Sétoise d’origine se décide de retrouver la cité comtale. Une installation qui a conforté une idée : « Je me sens chez moi à Barcelone »
Être barcelonais, « un véritable état d’esprit »
Si le sentiment d’appartenance à Barcelone peut être très présent pour certains Français, il s’étiole globalement au fil des années. En 2015, 69 % de la population locale déclaraient se sentir barcelonaise et appartenir à leur quartier. Ce chiffre est en chute libre. En effet, l’enquête municipale de 2022 révèle que le sentiment d’appartenance des Barcelonais aux quartiers dans lesquels ils vivent décroît à des « niveaux jamais vus ». Le pourcentage s’élève désormais à 52 %, soit -17 points par rapport à 2015. Malgré ces chiffres historiquement bas, les expatriés français font office d’exception. Morgane, 41 ans, vit à Barcelone depuis plus de 20 ans. Cette quadragénaire s’est installée dans la cité comtale pendant son année d’Erasmus. Depuis, elle n’a jamais quitté la ville catalane. « Au bout de 20 ans, j’ai envie de dire heureusement que je me sens Barcelonaise. Sinon j’aurais quitté la ville depuis longtemps ! »
Pour la Grenobloise d’origine, les années passées à Barcelone, notamment dans le quartier de Sant Marti, lui ont permis de trouver des repères et d’adopter des habitudes qui la définissent désormais comme Barcelonaise. « Le processus d’acculturation peut être long, mais à force de baigner dans la culture catalane, d’avoir des voisins Barcelonais, de parler quotidiennement avec eux ou encore de manger des tortillas de patatas et autres tapas, on finit a fortiori par s’identifier aux Barcelonais » analyse-t-elle. Tout un processus d’appropriation culturelle que certains Français de Barcelone ont dû entreprendre.
S’approprier la culture
Pour Marie, adopter les us et coutumes s’est fait naturellement : « Je suis mariée à un Catalan. J’ai en quelque sorte épousé la culture locale. Je me suis déconnectée du circuit francophone de Barcelone qui est assez actif ici. Quand on vit dans un pays, il est important de s’intéresser à sa culture. Je n’adhère pas forcément à toute les coutumes catalanes, mais je vis avec ».
Un sentiment partagé par Morgane. « Le fait d’être entourée de gens d’ici contribue à se sentir barcelonaise. La perception qu’ont les gens de vous également. Dans mon entourage, on a fini par me considérer comme la barcelonaise. Ce ressenti passe également par l’apprentissage de la langue locale. J’ai appris rapidement à parler espagnol, néanmoins je n’ai jamais maîtrisé le catalan, mais cela n’a pas posé de problème » nous confie l’ex-Grenobloise.
Ainsi, l’apprentissage de la langue a été le facteur le plus décisif pour s’approprier la culture espagnole. En effet, les traditions catalanes, telles que la Mercè ou la Sant Joan n’incarnent pas pour Morgane un élément primordial d’identification. « Je me sens Barcelonaise car la ville me correspond, je travaille ici, j’ai des amis catalans et, je ne me vois tout simplement pas retourner en France. »
Devenir barcelonais, pas évident pour tous
À l’opposé, pour une partie des expatriés français, se sentir barcelonais n’est pas gagné… Et ce, malgré plusieurs années passées dans la cité comtale. Pour Arnaud, 42 ans, originaire du centre de la France, les 15 années de vie à Barcelone ne lui ont pas suffi pour se sentir vraiment catalan. « Je suis arrivé ici en décembre 2006 pour passer un entretien d’embauche. J’ai fini par travailler ici dès 2007, en français, dans un call center. Je ne parlais pas du tout espagnol, alors j’ai décidé d’apprendre la langue assez vite. Je suis bilingue maintenant » détaille Arnaud, salarié chez un fabricant de lunettes.
Cependant, ses efforts ne l’ont pas spécialement aidé à se sentir Barcelonais : « Je me sens différent des Barcelonais. À chaque fois que je parle, on me dit « à tiens un Français »… Donc, c’est compliqué de se sentir barcelonais avec ce genre de remarques ».
Un détail qui atténue le sentiment d’appartenance. Il ajoute : « Pourtant, je lis la presse locale, je parle catalan et espagnol. Mais quand je vois les gens autour de moi, j’ai du mal à me sentir exactement comme eux. Je me sens du même continent, je suis intégré à fond, mais il y a un blocage sur le sentiment d’appartenance » confie le Français. Une situation que de nombreux Français de Barcelone peuvent subir. Cependant, même si le sentiment d’appartenance peut être atténué par diverses facteurs, le charme de Barcelone leur permet néanmoins de se sentir chez soi. « Je me sens ni Barcelonais, ni Français » résume Arnaud, avant de poursuive : « Mais une chose est sûre, ma vie ce est à Barcelone ! »