Alors que les salaires barcelonais ont longtemps été un frein à l’expatriation des Français, ils s’ajustent de plus en plus aux niveaux parisiens. Etat des lieux.
Photo : Mariona Gil/Ajuntament de Barcelona
« Le salaire n’est plus du tout une barrière pour s’installer à Barcelone », assure François Lejolly, fondateur de l’agence de recrutement Digital Selection. Malgré une certaine différence selon les secteurs d’activité, les fiches de paie barcelonaises n’ont désormais plus rien à envier à l’Hexagone. Si elles restent un peu inférieures aux salaires parisiens, la différence est comblée par la baisse du coût de la vie. « Sur des postes juniors par exemple, on peut perdre 2000 ou 3000 euros bruts à l’année par rapport à la province française, 5000 ou 6000 euros par rapport à Paris, mais on gagne quand même en pouvoir d’achat », poursuit l’expert français.
Une analyse partagée par Geoffroy de Beaucorps, l’un des associés du cabinet de recrutement international Blu Selection, qui observe une différence d’environ 15% d’une part et d’autre des Pyrénées : « même si les niveaux de salaires sont inférieurs à ceux observés en France, notamment à Paris, beaucoup de nos candidats ayant tenté l’expérience pensent qu’ils vivent mieux à Barcelone en termes de pouvoir d’achat ».
Pour les postes à responsabilité et les profils seniors (entre 60 000 et 150 000 euros annuels), les salaires deviennent même équivalents. « Ces opportunités sont plus difficiles à trouver, car Barcelone n’est pas Paris, mais quand on les trouve, les niveaux de rémunération sont souvent identiques », indique François Lejolly.
L’importance de l’anglais
Le cabinet Blu Selection a récemment mené une étude pour définir les niveaux de rémunérations des employés expatriés à Barcelone dans les multinationales et plateformes d’externalisation. « Le volume de la demande de professionnels francophones débutants augmente particulièrement sur le marché européen en raison du succès des startups françaises et de la croissance du marché », explique le cabinet.
En service client ou back office, les francophones sans expérience ont ainsi des salaires moyens de 18.000 euros bruts annuels (1250 euros nets environ par mois). Et avec plusieurs années d’ancienneté, ils atteignent 24.000 euros (1600 euros nets environ par mois). C’est dans les fonctions commerciales que l’évolution est, sans surprise, la plus intéressante : de 18.000 euros annuels pour un débutant à 41.000 euros pour un vendeur confirmé.
Le niveau d’études n’est pas spécialement valorisé pour ce type de postes, mais la maîtrise de plusieurs langues étrangères est un vrai plus, notamment l’anglais. « La possession d’un master ou d’un bachelor n’est pas un critère important pour l’emploi ou une rémunération plus élevée, à quelques exceptions près, expliquent les auteurs de l’étude, mais un niveau d’anglais courant est une exigence pour la plupart des projets pour lesquels les entreprises recrutent et un niveau d’anglais C1 peut être un critère pour un salaire plus élevé ».
La menace de l’inflation
Selon une récente étude de l’Aire métropolitaine, il faut gagner 1435 euros par mois pour vivre convenablement à Barcelone, sans se priver sur les loisirs ou autres dépenses courantes. Un chiffre qui varie en fonction des membres du foyer : pour un célibataire, il faut plutôt compter 1660 euros, et pour un couple sans enfants 1100 euros suffiront pour le même niveau de vie. Car c’est le logement qui fait grimper les dépenses, et vivre à deux (ou plus) fait notablement la différence.
Alors la hausse effrénée des loyers ces derniers mois dans la capitale catalane, cumulée à une inflation galopante, inquiète les recruteurs. « C’est un facteur que nous observons avec attention », confie François Lejolly. Face au manque constat de candidats français à Barcelone, une augmentation du niveau de vie pourrait à l’avenir entraîner une nouvelle augmentation des salaires pour les expatriés.