Si la location touristique est un marché très juteux à Barcelone, les risques sont très lourds en cas de logement non déclaré à ces fins, allant jusqu’à 600 000 € d’amende.
Photo : Europa Press
C’est un peu le printemps, sur les réseaux sociaux en ce moment. Les annonces de mise en location d’appartements à Barcelone fleurissent, alors que la saison touristique bat son plein. Et pour beaucoup, ce sont des appartements habités, que les propriétaires ou locataires laissent à des touristes pour quelques jours ou quelques semaines, sur la période de juillet-août. Un marché juteux, mais qui flirte souvent avec l’illégalité. En témoigne un francophone, qui annonce sur Facebook sous-louer son appartement à Barcelone sans être « certain d’être autorisé à faire de la sous-location« .
Car tout le monde ne peut pas louer son logement à des touristes, à Barcelone. Pour cela, il faut d’abord posséder une licence spécifique, qui dépend de certains critères. Il faut tout d’abord louer au moins deux fois par an son logement, mais qu’il ne soit pas loué à la même personne plus de 31 jours de suite. Le logement doit avoir un “certificat d’habitabilité” (‘cédula de habitabilidad’) et respecter le nombre de locataires qui y est inscrit, et enfin disposer de tout le nécessaire et de tous les meubles pour être loué, dans de bonnes conditions d’hygiène.
Pour obtenir la licence, il faut la demander au Registro de Turismo de Cataluña, qui fournira un numéro (le NIRC) qui devra être présent sur toutes les annonces proposant le logement à la location. Et cette licence coûte… 227 €.
Des zones interdites aux nouveaux logements touristiques
Si obtenir la licence de logement touristique peut sembler plutôt simple bien que coûteux, ce n’est pas le seul prérequis pour louer à des touristes. Il faut aussi posséder au moment de demander la licence un rapport favorable du Plan spécial urbanistique de logements touristiques (Plan Especial Urbanístico de Alojamientos Turísticos), qui coûte 57 € et ne peut pas être obtenu par n’importe qui. Ce plan, mis en place par la mairie en 2017, vise à limiter le nombre de logements touristiques à Barcelone et a donc établi des zones où l’ouverture de nouveaux appartements touristiques est restreinte, voire interdite.
Photo : Antonio Moreno
C’est le cas par exemple des quartiers de Ciutat Vella, la Rambla, l’Eixample, la Vila de Gràcia, Sant Antoni, Poble-Sec, Vila Olímpica ou encore Poblenou, trop concentrés en logements touristiques, et où l’on ne peut désormais plus obtenir aucune licence touristique, ni même agrandir un logement touristique déjà existant. Bien sûr, l’obtention de ce rapport comprend aussi d’autres critères pour le logement, comme ne pas se trouver en rez-de-chaussée ou ne pas avoir été destiné à la résidence fixe depuis le 1er juin 2015. En bref, il peut être difficile voire impossible de se mettre à louer son bien immobilier aux touristes du jour au lendemain, à Barcelone.
Sans parler du fait que pour louer un logement à des touristes, si l’on est pas propriétaire mais seulement locataire, il s’agit alors de sous-location et la chose se complique encore : il faut aussi posséder l’accord écrit du propriétaire, ne louer qu’une partie du logement et toujours y vivre, et le prix de la location ne doit pas dépasser le prix du loyer.
Jusqu’à 600 000 € d’amende
Au vu de ces difficultés, il peut être tentant pour certains de louer ou sous-louer illégalement leur appartement, un marché juteux à Barcelone grâce à diverses plateformes dont AirBnB qui communique très peu sur l’illégalité de la pratique. Mais cet acte n’est pas sans conséquence, car les amendes peuvent être très, très salées.
Photo : Antonio Moreno
Pour une location touristique sans licence appropriée, l’infraction est considérée comme très grave en Catalogne et les sanctions vont de 3000 € à 60 000 €, depuis 2017. Dans certains cas, l’amende s’élève à 3000 €, lorsque le loueur se trouve dans une situation économique vulnérable (si les revenus du foyer ne dépassent pas le double du salaire minimun) par exemple. Elle monte à 6001 € si la location touristique est occasionnelle, si le propriétaire se montre collaboratif et retire toutes ses annonces de location, s’il s’agit d’un seul et même logement et le seul dans lequel vit habituellement le propriétaire. Mais en cas de récidives ou s’il existe des plaintes, la note grimpe très vite.
Dans le cas précis de la sous-location illégale, le risque principal est de se faire expulser de son logement, en n’ayant pas respecté les termes du contrat de location. Le propriétaire peut aussi déposer plainte contre son locataire.
Les logements touristiques illégaux, combat de la mairie
Depuis plusieurs années déjà, la mairie de Barcelone a fait de la lutte contre les logements touristiques illégaux l’un de ses combats principaux. En juillet 2022, Barcelone comptait au moins 500 logements touristiques illégaux, la majorité d’entre eux loués sur la plateforme AirBnB. C’est bien moins que les années précédentes, au cours desquelles on en trouvait jusqu’à 6000 dans toute la ville, mais c’est déjà trop pour la mairie qui a renforcé son équipe chargée de localiser ces appartements.
Entre 2017 et 2021, plus de 9000 amendes ont été mises, et la mairie ne compte pas en rester là. Une campagne est actuellement en cours pour informer touristes et locaux de l’illégalité de certaines locations, et la maire Ada Colau a annoncé demander de l’aide à l’Union européenne pour renforcer ce combat… après l’été.
Plus d’infos et la liste des logements touristiques légaux ici.
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