Il y aura du monde en Espagne cet été. Trop même, pour ce que le pays sera capable de gérer.
Après deux ans de pandémie, l’Espagne attire les touristes comme l’aimant accroche le fer. On note depuis le printemps un tourisme en Espagne inhabituel pour cette période. Aussi bien sur la côte qu’à Barcelone ou Madrid. L’ensemble des professionnels du tourisme s’accordent sur un point : le nombre de visiteurs sera historiquement haut sur la période juillet-août. Un afflux de vacanciers qui va mettre les infrastructures du pays sous pression alors qu’elles sont moins opérationnelles qu’avant la crise sanitaire.
Le problème des aéroports espagnols
En premier lieu, les aéroports espagnols ne seront pas en capacité d’accueillir correctement l’ensemble des passagers. Déjà avant la pandémie, les terminaux de Barcelone étaient sans dessus dessous durant l’été 2019. Files ininterrompues de voyageurs, pertes de bagages, retards et annulation de vols ont rythmé le dernier mois d’août avant la pandémie.
Lors de ce lundi de Pentecôte, l’aéroport de Madrid n’a pas résisté face à la charge de voyageurs. Les files de voyageurs étaient si longues que beaucoup n’ont pas pu monter à temps dans les avions qui ont décollé sans eux. D’autres passagers ont dû subir des retards tellement importants qu’ils ont perdu leurs correspondances. Depuis le week-end de Pâques, rien qu’à Madrid, on estime à 15.000 le nombre de passagers ayant perdu leurs correspondances pour des problèmes de retard. Les buggs ont surtout concerné la compagnie Iberia. Dans un dur communiqué, l’opérateur a accusé le gouvernement espagnol de ne pas dédier suffisamment d’agents de police pour les contrôles, ce qui occasionne une lenteur et forme des queues interminables.
A Barcelone, la situation est encore pire car la police a été remplacée par des agents de sécurité suite à une opération de privatisation en 2017. Ceux-ci étaient déjà mal formés et en sous-nombre durant l’été 2019. Avec le quasi arrêt de l’activité aériennes pendant les mois de plomb de la pandémie, beaucoup se sont reconvertis dans d’autres domaines. Il faut donc réengager la formation d’un personnel qualifié, ce qui nécessite plusieurs semaines. Ensuite, pour d’évidentes raisons de sécurité, chaque agent doit obtenir un agrément du gouvernement espagnol, ce qui peut durer un mois. On comprend donc que l’aéroport de Barcelone ne sera pas dans les conditions optimales pour accueillir un nombre de passager record cet été.
Air France estime que la saison 2022 sera à hauteur de 90% par rapport à 2019. Les low-cost tablent sur des chiffres encore plus élevés. Ryanair et Easyjet attendent un retour de 100% de leurs passagers. Lufhtsansa estime quant à elle dépasser le nombre de voyageurs de 2019.
Le problème des loueurs de voitures
Pour celles et ceux qui opteront pour la location d’une voiture, il va falloir passer à la caisse dès maintenant. Les principaux loueurs du pays le reconnaissent : ils ont bien plus de clients que de véhicules disponibles. La flotte de voitures espagnoles étaient de 820.000 véhicules en 2019, elle est de 600.000 cette année. Les voitures sont donc plus rares et les prix ont littéralement explosé. Dans certains cas, ils sont passé du simple au double, voire au triple sur les périodes et les destinations les plus prisées. Et il faut réserver très en avance pour être sûr de ne pas se retrouver le bec dans l’eau.
Les loueurs de voitures veulent-ils se gaver financièrement ? La réponse est plus complexe, et les causes multiples. Tout d’abord, avec les restrictions de circulation les loueurs ont vendu leur parc automobile pour avoir des liquidités financières. Il faut donc aujourd’hui recomposer ces flottes. Mais la fabrication de micro-chips, cette pièce électronique indispensable dans une automobile, est très ralentie depuis la crise du Covid. Il est donc difficile d’acheter des voitures et les loueurs ne sont pas prioritaires chez les fabricants car ils achètent à des tarifs plus bas que les particuliers.
Le problème du personnel
Enfin une fois arrivé à bon port, il restera un dernier obstacle pour le vacancier : la pénurie de personnel dans l’hôtellerie et la restauration. A titre d’exemple, la station balnéaire catalane de Lloret del Mar à elle seule a encore besoin de 120 personnes pour assurer le service cet été.
Si cette saison s’annonce critique – certains patrons affirment qu’ils devront fermer partiellement leurs établissements faute de personnel – c’est parce que le Covid est passé par là. Avec les restaurants, bars et hôtels fermés ou sous restrictions pendant 2 ans, de nombreux employés du secteur se sont reconvertis. Dans la grande distribution par exemple. Les horaires de nuit y sont majorés d’un plus salarial et les jours de congés respectés, expliquent les syndicats. Beaucoup sont donc partis pour un aller simple et ne veulent plus revenir trimer dans la restauration.