Le Camp Nou est né en 1957, en pleine dictature franquiste. Plus qu’un stade de foot, il est depuis plus de 60 ans un lieu symbole de liberté, d’identité et d’influence pour de nombreux Barcelonais.
Si “Més que un club” est la devise du FC Barcelone, ce n’est pas un hasard. Depuis 1957, le célèbre stade du Camp Nou a eu un véritable rôle dans l’Histoire de la ville, voire même du pays, de la dictature franquiste jusqu’à la crise indépendantiste catalane. Au-delà du sport, les gradins du stade barcelonais sont rapidement devenus un lieu de liberté d’expression et de contestation populaire.
Le Camp Nou : un lieu de révolte et de liberté
Sous Franco, « c’était le seul endroit où les gens pouvaient parler catalan sans se faire arrêter par la police« , affirme Olivier Goldstein, journaliste sportif à Barcelone. Avec plus de 48 000 supporters, la police ne pouvait pas surveiller tous les faits et gestes de chacun.
Ce qui était fait dans le stade ne pouvait pas être fait à l’extérieur et les Barcelonais l’ont très vite compris. C’est pourquoi, il est devenu un lieu de revendication, où chaque limite était repoussée. Par exemple, lors d’un match du Barça au Camp Nou, la phrase « S’ha perdut un nen », qui signifie « un enfant s’est perdu », fût annoncée en catalan par le speaker. “À ce moment-là, il n’y avait aucun enfant disparu, mais il s’agissait uniquement de tester les autorités et de voir jusqu’où on pouvait aller”, raconte le journaliste spécialisé du FC Barcelone.
Des relations ambiguës avec Franco
Au début du régime, le Barça apparaît comme le club anti-franquiste par excellence. Des menaces dans les vestiaires à l’intimidation pour transférer de grands joueurs vers le club de la capitale, le club « blaugrana » a reçu plusieurs fois des pressions de la part du pouvoir franquiste.
Le Général Franco lors d’un match au Camp Nou.
Pour autant, le Caudillo aurait participé et aidé financièrement le club catalan, notamment lorsque celui-ci était endetté par la construction du Camp Nou. Franco aurait appuyé en la faveur du club barcelonais pour revendre les terrains de l’ancien stade des Corts. Des relations plutôt ambiguës, puisque le Barça a même décerné plusieurs médailles d’honneur au général Franco. Un geste étonnant que même le club considéré comme celui du gouvernement de l’époque, le Real Madrid, n’a pas réalisé. C’est seulement en 2019 que les responsables du club catalan ont décidé de retirer ces distinctions.
Le porte-drapeau du peuple catalan
“Depuis 1910, le Barça est du côté de la société catalane qui veut l’émancipation de la Catalogne”, poursuit Olivier Goldstein. Après la dictature, le drapeau catalan, la senyera, n’est plus interdit et entre donc pour la première fois de manière légale dans le Camp Nou, en décembre 1975. Le drapeau rouge et jaune est aussi filmé pour la première fois à la télévision. Mais cela marque surtout le début de la diffusion de l’identité catalane à travers le club de foot barcelonais.
Match de Ligue des Champions entre Barcelone et le Borussia Dortmund, le 27 novembre 2019, au Camp Nou.
Des chants catalans sont scandés dans les tribunes, des affiches indépendantistes sont brandies, le Camp Nou devient un véritable moyen de communication pour les indépendantistes catalans. Pourtant en 2017, le club tente d’apaiser la situation en jouant le “ni pour, ni contre” et ne se positionne pas.
Une dimension politique et sociale que le club a toujours revendiquée, notamment à travers sa devise “Més que un club”. Aujourd’hui, le FC Barcelone passe avant tout par le softpower pour accroître son influence. Comme le disait l’écrivain et journaliste catalan, Manuel Vázquez Montalbán, le Barça est “le bras armé de la Catalogne, mais sans armes”.
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