Vivre à côté d’un squat à Barcelone : de la colère à la tolérance

Réveillé à 7h du matin par une perquisition de police, des chiens menaçant ou bien des départs de feux dans l’immeuble, vivre à côté d’un squat à Barcelone n’est pas sans rebondissements.

Marianne vit à Barcelone depuis 8 ans, dans le Gótico, près de la Plaça Reial, “lorsqu’un lundi matin, à 7h, un bruit assourdissant m’a réveillée, en faisant trembler tout l’immeuble”. Rejointe par ses colocataires, la jeune femme découvre derrière sa porte d’entrée, “des policiers armés jusqu’aux dents”. Dans le cadre d’une enquête de drogue, l’appartement juste en dessous, squatté par une famille, était l’objet d’une perquisition. Le père, arrêté, sa femme et ses enfants vivaient illégalement depuis quelques mois, voire presque un an, dans le logement appartenant à une banque. Un profil de squatteurs qui n’étonne pas l’avocat David Martinez Cubells, spécialisé en occupation illégale, “il s’agit de personnes, souvent des familles, en situation difficile, au profil économique très bas et qui n’ont pas les moyens de louer à Barcelone« , explique-t-il.

“Ils faisaient des barbecues dans l’appartement”

Dans le Raval, près de San Antoni, un petit appartement est occupé illégalement par une famille de 6 à 10 personnes, une cohabitation insupportable pour les voisins. “Il y avait des départs de feux réguliers depuis leur logement parce qu’ils faisaient des barbecues dans leur appartement !” explique l’avocat des plaignants. En plus des bruits, les parties communes sont dégradées, notamment la cage d’ascenseur et la cave. La communauté des propriétaires est donc alertée et porte plainte pour tapages et dégradations de biens. Le logement, appartenant à un propriétaire décédé, est légué à une fratrie qui ne vit pas en Espagne, la gestion de l’appartement est donc abandonnée.

Intervention pompiers dans un squat à BarceloneIntervention de pompiers dans un squat à Barcelone.

Ce genre de situation n’arrive pas seulement à Barcelone et n’épargne pas les stations balnéaires huppées. À Sitges, un couple britannique a logé pendant 3 mois à côté d’un squat. Un lieu paradisiaque, devenu l’enfer. « On entendait des cris de toutes sortes, des chiens dangereux et menaçants, ni tenus en laisse, ni muselés ” explique leur avocat. Avec 8 personnes dans un studio de 60 m², les voisins britanniques ont plusieurs fois porté plainte pour tapage nocturne. La police municipale de Sitges est intervenue à plusieurs reprises, « jusqu’au jour où l’un des agents s’est fait attaquer par un chien. Ensuite, c’est la brigade cynophile des Mossos qui est intervenue » affirme l’avocat des plaignants.

Après une expulsion et une demande de contrôle d’accès à l’entrée de l’immeuble, les squatteurs sont revenus. Il aura fallu une négociation et une somme d’argent versée par le propriétaire pour que les squatteurs quittent définitivement les lieux.

Heureusement, tous les logements occupés ne sont pas aussi négatifs. Une habitante de l’Eixample, qui souhaite rester anonyme, vit par exemple à côté d’un squat depuis 15 ans, et n’a jamais eu de problèmes. “lls ne dérangent personne, leurs activités ne font pas trop de bruit, leur présence ne contrarie personne. Il s’agit de voisins comme les autres” affirme la Barcelonaise de 70 ans.

“Les voisins d’un squat ne peuvent rien faire”

Le vide juridique autour des droits des voisins habitant à côté d’un squat est un véritable problème selon les avocats spécialisés en occupation illégale. Seuls le propriétaire et le locataire du logement occupé peuvent recourir à la justice.

Pour David Martinez Cubells, la solution serait de donner d’abord plus de moyens, notamment économiques, à la justice espagnole pour cibler ce genre de problème et accélérer les processus d’expulsions. Mais si les squats sont aussi nombreux, c’est aussi parce que se loger à Barcelone est devenu inaccessible pour les foyers les plus nécessiteux, et les aides presque inexistantes. D’où la compréhension des habitants envers les okupas : un tiers des Barcelonais les comprennent selon la dernière enquête de la mairie.

La Catalogne est l’une des régions d’Espagne les plus confrontées à ce problème, avec 5 689 « squats » en 2021, soit 42% du total national. Des chiffres peu flatteurs, qui persistent depuis déjà quelques années.

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