L’enfer des Russes à Barcelone

Ils sont 25.000 en Catalogne, dont un tiers à Barcelone, et leur vie a basculé le 24 février. Dans la capitale catalane, les Russes font l’objet de discriminations, insultes et menaces depuis l’offensive de Vladimir Poutine en Ukraine.

« Je n’aurais jamais pensé vivre ça » confie une vendeuse russe, installée à Barcelone depuis 15 ans. Employée dans un joli magasin de spécialités d’Europe de l’Est et de Russie, elle raconte être menacée de mort et décapitation plusieurs fois par jour et être allée déposer plainte auprès des Mossos d’Esquadra. « J’ai moi-même des amis très proches qui sont Ukrainiens, je pleure souvent devant les images du conflit, alors je comprends la colère des gens, tout ce que je peux faire c’est écouter leur colère »,  poursuit-elle en insistant pour que ne soient divulguées ni son identité ni l’adresse de sa boutique. Cette Barcelonaise d’adoption raconte qu’elle veille désormais à ne plus parler russe dans la rue et avoir peur pour son intégrité physique. « Je suis contre la guerre, ce n’est pas notre guerre, explique-t-elle, mais cela nous fait beaucoup de mal ». Plusieurs de ses proches également russes et cherchant actuellement à louer une chambre à Barcelone n’essuient que des refus depuis une semaine.

L’ambiance est tout aussi pesante dans le supermarché russe Teremok, situé passeig Saint Joan. « On nous menace, on nous insulte, les gens profitent d’avoir le masque, on ne voit pas vraiment leur tête » explique à Equinox une employée, elle aussi réclamant l’anonymat. En plus des invectives constantes contre le personnel, le magasin a été attaqué à coups de peinture sur la façade.

Harcèlement en ligne

Dans le quartier de Sant Antoni, Genya Petrova a rapidement décidé d’afficher son rejet des décisions de Vladimir Poutine. Aux premiers jours du conflit, la gérante du restaurant Ekaterina a accroché des pancartes « Contre la Guerre », « Stop Poutine » et « Nous sommes avec l’Ukraine » pour faire cesser le harcèlement. « J’ai été obligée de prendre position dans ce conflit car j’étais attaquée pour ma nationalité, et je ne voulais pas qu’en ne disant rien, on pense que je soutenais la guerre », a-t-elle expliqué sur la chaine de télévision municipale Beteve. « L’un de nos cuisiniers a de la famille en Ukraine, et j’ai les larmes aux yeux quand il m’explique ce qu’ils sont en train de vivre », poursuit la gérante.

restaurant russe

Eddie Arola et Genya Petrova du restaurant Ekaterina, avant la guerre

L’entrepreneuse a dû faire face à une baisse notable des réservations et à de nombreuses annulations, mais aussi à un véritable lynchage de son restaurant sur les réseaux sociaux. L’enseigne reçoit également des avis négatifs sur différentes plateformes, postées par des utilisateurs qui ne sont jamais venus manger, et faisant baisser la note et donc la réputation du restaurant.

De son côté, l’institution culturelle La Casa de Rusia (La Maison de Russie) a décidé mardi de fermer ses portes et suspendre toutes ses activités jusqu’à nouvel ordre. Non sans condamner à son tour le conflit. « Notre objectif est d’unir les personnes et les cultures de différents pays, c’est pourquoi nous sommes contre tout type d’action qui sépare les gens », a-t-elle indiqué dans un communiqué.

Lire aussi : La Russie est-elle vraiment un grand investisseur en Espagne ?

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