Barcelone, la Parisienne

Si Paris est éternelle, Barcelone sera immortelle tellement les deux villes possèdent un lien fort dans les domaines culturels, artistiques, politiques et économiques.

« Quand je voyage à Barcelone, je m’aperçois de l’influence parisienne » confie à Equinox, un directeur de cabinet de la mairie de la capitale française. « C’est exactement le même schéma de rénovation urbaine post-Covid et des tracés similaire pour limiter la circulation des véhicules à moteur et créer massivement des pistes cyclables » poursuit le haut fonctionnaire. Et pour cause, les urbanistes parisiens ont travaillé directement avec les équipes de Barcelone pour tracer les nouvelles voies après le confinement avec les fameuses bandes jaunes qui ont fait hurler tant les Français que les Catalans.

Un amalgame somme toute naturel pour les équipes d’Anne Hidalgo, avec encore en tête l’idée qu’un Parisien, Manuel Valls, a tenté de se convertir en maire de Barcelone.

Expulser les voitures (et le bruit)

Si les municipales de la fin des années 2010 de Paris s’étaient en partie joué sur la piétonisation des quais de la Seine, le débat du prochain scrutin de Barcelone de 2024 portera sur l’expulsion des véhicules à moteur du quartier de l’Eixample. Saturé de motos et voitures, le district dessiné par Cerda est saccagé par la pollution atmosphérique, mais aussi acoustique. « Le bruit d’une moto fait autant de bruit que 10.000 bicyclettes » se plaisent à répéter les associations anti-bruits du quartier.

Pour tenter de réduire le bruit dans ses rues, les mairies de Paris et Barcelone testent le même revêtement sur la chaussée. Depuis fin 2021, sur la rue Torrent de l’Olla entre la rue de Sant Perpètua et la Travessera de Gràcia, une matière recouvre le goudron classique pour réduire la pollution sonore générée par le trafic routier. A Paris, le même revêtement est testé dans les rue de Courcelles (8e), Lecourbe et Frémicourt (15e).  Il permettrait de diviser la puissance de la source sonore par deux.

rue Torrent de l’Olla

Une mesure insuffisante pour les inciviques à deux roues, qui accélèrent comme des démons, passent en sur-régime ou se baladent avec des pots d’échappements trafiqués. Pour freiner les amateurs de bruit stridents, la mairie d’Ada Colau, comme celle d’Anne Hidalgo, débutent l’implantation des radars anti-bruit qui flasheront les moteurs émettant un vacarme supérieur à plus 80 décibels. Depuis la semaine dernière, les radars sont actifs dans les 17e et 20e arrondissements à Paris. Il existe une volonté d’implanter des radars contre la contamination acoustique surtout dans les rues limitées à 30 kilomètres heure, indique la mairie de Barcelone sans donner plus de précisions sur les lieux choisis et les dates de mises en service.

Les artistes

Les politiques progressistes entraînent dans leur sillage des artistes engagés. « En juin dernier, je reçois un coup de fil de Nacho Padilla, directeur créatif de la mairie de Barcelone, qui me propose de créer l’affiche de la Mercè 2021″se remémore la Parisienne Malika Favre. Cette Française de Barcelone dessinera la mythique affiche des 100 ans de la Mercé avec une touche féministe, après avoir créé celle de Paris-Plage en 2018.

Malika Favre, Française de Barcelone et créatrice de l'affiche de la Mercè 2021

Ce train d’union artistique n’est pas une nouveauté. « Depuis un siècle, les Catalans tournent plus leurs regards vers Paris que Madrid » déclare à Equinox l’indépendantiste Ferran Mascarell, ministre catalan de la culture entre 2010 et 2015. Il y a une vraie synergie pour les artistes entre Paris et Barcelone.

En 1910 déjà, Jean Genet, en un mouvement de plume quittait Paris pour écrire son journal d’un voleur à Barcelone. Plus récemment, Mathias Énard après des études à l’école du Louvre et avoir dirigé une revue littéraire parisienne, posa ses valises en 2000 à Barcelone. Il y signa ses plus grandes œuvres avant de remporter le Goncourt en 2015.

Si Barcelone n’a pas son Café de Flore, elle est une des capitales littéraires avec notamment la Sant Jordi. A cette occasion, « Barcelone est la seule ville au monde qui transforme ses rues en festival du livre » explique à Equinox l’auteur Grégoire Polet.

En somme, Balzac aurait pu très bien imaginer un épisode de la vie de Lucien de Rubempré ou de Rastignac à Barcelone.

Mendetz salen de la cueva este viernes en Razzmatazz Clubs - Eargasm WebEargasm Web

L’harmonie Paris-Barcelone fonctionne également dans le domaine musical. Selon Javier Estalella, l’un des directeurs artistiques de la discothèque Razzmattaz,  » Daft Punk, Vendredi Sur Mer,  Polo & Pan, il est clair que le public catalan veut écouter des artistes parisiens ». « Et les deejays de la capitale répondent toujours présents pour prendre les platines du mythique club de Barcelone » confie-t-il en ajoutant que « les Parisiens eux-mêmes, résidents permanents ou touristes à Barcelone, viennent assister à ces belles soirées ».

L’économie

Économiquement, l’influence parisienne sur Barcelone n’est plus à démontrer. Moultes entrepreneurs font le trajet Barcelone-Paris pour gérer leurs commerces dans les deux villes. Tandis que d’autres y déploient les mêmes concepts. C’est le cas de Bertrand, qui vit depuis une vingtaine d’années à Barcelone. Il a récemment ouvert une boulangerie dans le quartier de la Sagrada Familia. Pour ce jeune créateur d’entreprise, il était naturel de choisir une enseigne parisienne, celle de BO&MIE en l’occurrence, pour se lancer dans la capitale catalane. « Ils ont déjà 3 boulangeries à Paris, c’était logique d’en ouvrir une autre à Barcelone » s’enthousiasme le professionnel.

Lancement officiel de la nouvelle French Tech Barcelone

Enfin le hub technologique qu’est en train de devenir Barcelone constitue la connexion ultime entre les deux villes. Avec Londres un peu hors circuit en raison du Brexit, Barcelone et Paris se partagent désormais le gâteau des starts-ups,  remarque le cabinet de recrutement Qamyno. Avec un net mouvement vers le Sud et le soleil, caractéristiques qui ont pris toute leur importance après des années Covid difficiles. « Avant on montait faire carrière à Paris, maintenant on descend à Barcelone » assure Pierre Farré, cofondateur de Qamyno.

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