En écoutant deux locuteurs espagnols parler entre eux, nous avons l’impression que leur débit est plus élevé que le nôtre, en français. Comment s’explique une telle différence d’élocution ? Equinox tente d’y répondre.
En voyage en Espagne pour la première fois, il est possible d’être surpris par la rapidité de l’élocution espagnole. Leur phrasé semble, en effet, bien plus rapide que le nôtre. Un constat qui n’a pas échappé à des linguistes de l’Université de Lyon en 2011, qui ont tenté de mesurer la vitesse d’élocution de différentes langues et de préciser leur débit. Les résultats de leurs travaux ont été publiés dans la revue Language la même année.
« Notre but était de déterminer si, en matière d’efficacité de communication, certaines langues étaient plus intéressantes que d’autres, indique Egidio Marsico, du Laboratoire dynamique du langage de l’Université de Lyon, à la revue Language. Pour ce faire, les chercheurs ont rédigé des textes, dans 17 langues, qui portaient la même information sémantique. Ces textes ont été soumis à divers locuteurs. « Une soixante de personne se sont livrées à l’exercice et nous avons aussi calculé, langue par langue, la charge informative de chaque syllabe par rapport à une langue étalon : le vietnamien » détaille le linguiste.
Logorrhée et densité d’informations
Verdict de l’étude : chaque langue transmet la même quantité d’informations pour un même temps de parole imparti. Plus les syllabes contiennent de l’information, moins il y a de syllabes par seconde, et donc plus cette langue semble être parlée lentement.
Par exemple, l’anglais, avec une densité d’informations contenues par syllabe de 0,91, est parlé avec une moyenne de 6,1 syllabes par seconde. Du côté espagnol, le débit est de 7,82 syllabes par seconde. En français, il n’est « que » de 7,18. Ainsi, nous avons l’impression qu’un Britannique parle plus lentement qu’un Espagnol ou qu’un Français, mais en réalité, malgré un débit de parole par seconde différent, la même densité d’informations est transmise.
Ainsi, les linguistes de l’Université de Lyon se sont aperçus que les 17 langues étudiées délivrent toute l’information à un rythme avoisinant les 39 bits par seconde. Il s’agit du débit d’informations potentiellement « optimal pour le traitement de la parole par le cerveau humain » estime Egidio Marsico. En effet, parlée trop vite, une langue dense apporterait un tel flot d’informations qu’elle serait difficile à comprendre. À l’inverse, une langue à faible densité énoncée lentement obligerait l’auditeur à un trop grand effort de mémorisation pour reconstituer l’ensemble du message délivré.
En somme, malgré le débit de parole légèrement supérieur, un Espagnol transmet la même quantité d’information qu’un Français dans un même laps de temps. Il ne vous reste donc plus qu’à éduquer votre oreille pour gommer cette impression de logorrhée espagnole.
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