Le gouvernement catalan et la galère de l’extrême-gauche

Gouvernement catalan

Le gouvernement catalan tente sans succès d’obtenir le concours de l’extrême-gauche indépendantiste pour sauver le budget de la Catalogne en 2021.

Le gouvernement catalan est de tendance sociale-démocrate. Centre-gauche pour ERC et le président Pere Aragonès, et avec des accents plus libéraux pour Junts Per Catalunya, le parti de Carles Puigdemont. Les deux mouvements ont recueilli le gros des votes indépendantistes lors des dernières élections, et disposent de 65 députés.

La majorité parlementaire en Catalogne est fixée à 68 sièges. Le gouvernement d’ERC et Junts doit faire appel à une tierce force pour approuver ses lois et son budget. La politique socio-économique du gouvernement de Pere Aragonès est très similaire à celle de l’exécutif socialiste espagnol.

Un pacte entre gouvernement catalan et socialistes ?

Fort logiquement, pour faire approuver le budget général de la Catalogne 2021, présenté la semaine dernière par le ministre de l’Économie, le gouvernement pourrait s’appuyer sur le groupe socialiste, dont son président Salvador Illa a annoncé la disposition favorable.

Un nouveau marqueur politique : le gouvernement indépendantiste pactiserait avec un parti dit « espagnoliste ». Hors de question pour ERC, qui veut poursuivre le récit de la Catalogne se dirigeant vers son destin de nation indépendante. Le gouvernement va alors se lancer dans la galère de faire approuver ses comptes par l’extrême-gauche anti-système de la CUP, et minoritaire dans l’électorat indépendantiste avec seulement 9 parlementaires.

La possible humiliation politique

Horrifiée par le projet social-démocrate contenu dans le budget, la CUP a annoncé, après consultation d’une assemblée de 400 militants, qu’elle déposerait une motion préalable de rejet des comptes, c’est à dire un vote négatif empêchant la lecture du texte au Parlement.

Une humiliation politique qui n’empêche pas le gouvernement de continuer à draguer les anti-systèmes : les aides au développement du grand complexe de casino et d’hôtels (Barcelona World) à Tarragone ont été retirés des comptes 2021, au grand dam des maires de la zone.

Photo : Generalitat

Le gouvernement de Pere Aragonès s’engage également devant la CUP à ne pas financer la candidature catalane aux jeux Olympiques d’hiver de 2030, dans les Pyrénées.

Enfin, ultime génuflexion de la majorité gouvernementale, les services juridiques de la Generalitat retireront les charges d’accusation dans les procès d’attaques contre la police lors de manifestations. Souvent, ce sont des militants de la CUP qui étaient poursuivis par le gouvernement, après avoir participé à des émeutes ou autres rassemblement violents.

Malgré tous ses compromis, l’ogre anti-système n’est pas rassasié et rejettera probablement lundi prochain les budgets de Pere Aragonès. Et on le comprend : va t-on demander à la France Insoumise d’appuyer la politique sociale, économique et fiscale du président Macron ?

Un indépendantisme pluriel, depuis 2015

Depuis 2015, l’indépendantisme ne veut pas reconnaître sa pluralité idéologique, ce qui conduira à la mort politique prématurée d’Artur Mas. Conservateur libéral, le 130ème président de la Generalitat s’était aventuré sur les terres anti-systèmes pour tenter une improbable investiture soutenue par la CUP. « Nous avons jeté le président Mas dans la corbeille de l’histoire » clamaient alors, extasiés, les députés anti-système.

Depuis 6 ans, c’est la même histoire : la CUP demande au gouvernement catalan de démanteler la police catalane, de nationaliser à tout-va, de baisser les impôts, de supprimer l’école privée. Face à quoi le gouvernement change invariablement de sujet et demande à la CUP d’avoir le sens de la nation et de soutenir l’exécutif indépendantiste en place.

Fin cuisinier, notamment de paella, le président Aragonès devrait pourtant savoir avec le temps que l’on ne mélange pas l’huile et le vinaigre.

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