Tribune libre de Laura Borràs i Castanyer, présidente du Parlement de Catalogne.
Ce samedi 11 septembre, c’est la fête nationale de la Catalogne. Une célébration, celle de la fête nationale, qui dans le monde entier est une date d’une grande importance, symboliquement adoptée par une nation et avec laquelle elle contribue à l’union de ses citoyens. Et c’est sans aucun doute le sens de la fête nationale de la Catalogne : une journée pour célébrer qu’avant tout, nous sommes une nation, nous sommes un peuple.
Notre fête nationale, que nous commémorons aujourd’hui, nous rappelle non seulement la chute de Barcelone après une résistance héroïque des défenseurs de la ville, mais elle représente aussi le souvenir de ce qui fut le dernier moment de l’existence d’une forte conscience nationale sans complexe et souveraine, à part entière. Le dernier jour où nous étions un pays libre.
D’où l’importance de la commémoration. Parce que nous savons qui nous sommes, d’où nous venons et où nous voulons -et pouvons- aller : dans une Europe qui se dit ouverte, démocratique et plurielle et où nous pourrons demeurer en toute liberté. C’est pourquoi il faut évoquer, rappeler, commémorer, faire un devoir de mémoire, en définitive, de qui nous étions.
L’histoire d’une nation est la somme de plusieurs jours et de plusieurs dates historiques. Rappelons que l’histoire de la Catalogne comprend des défaites, comme celle du 11 septembre, mais aussi de grandes victoires. Comme la victoire démocratique qui a conduit à l’exercice de l’autodétermination le 1er octobre. C’est précisément à cause de la force de ce triomphe démocratique que les ennemis de la liberté de la Catalogne veulent le réduire à une défaite aux mains de la répression de l’État espagnol. C’est devenu une date indélébile de grande importance dans le processus que nous avons entamé vers l’indépendance de la Catalogne.
Et nous devons nous en souvenir car, après tout, celui qui perd sa mémoire perd son identité. Ainsi, nous ne devons pas oublier que ce n’est qu’en regardant le passé et en tirant les leçons de l’histoire que nous pourrons arriver à construire l’avenir que beaucoup veulent imaginer.
Cette année, nous commémorons le cinquantième anniversaire du discours que Pau Casals a prononcé aux Nations unies en 1971. Le maître violoncelliste -qui était l’un des hommes les plus illustres et honorables qui ont aimé la Catalogne et qui l’ont représenté dans le monde à travers la musique- a été contraint de quitter sa patrie et de s’exiler de l’autre côté des Pyrénées, à Prades. Comme beaucoup d’autres personnes, il a été contraint à l’exil afin de continuer à vivre et à jouer sa musique en toute liberté.
Exil et liberté : deux mots qui semblent contradictoires, mais qui vont de pair lorsqu’ils sont associés aux mots « Europe » et « Catalogne ». Et c’est pourquoi moi, comme Pau Casals l’a fait dans son bref discours aux Nations unies en 1971 avant de recevoir la Médaille de la paix et de jouer son hymne, le Cant dels Ocells, une autre grande contribution catalane au monde, je suis fier de pouvoir dire : « Je suis Catalan. Aujourd’hui, une province d’Espagne. Mais qu’a été la Catalogne ? : la Catalogne a été la plus grande nation du monde. Et je vais vous dire pourquoi. La Catalogne a eu le premier parlement, bien avant l’Angleterre. La Catalogne a été au commencement des Nations unies. Toutes les autorités de la Catalogne au XIème siècle se sont réunies dans une ville de France, à l’époque la Catalogne, pour parler de paix […]. La paix dans le monde contre les guerres, l’inhumanité des guerres. C’était la Catalogne ».
Dans un contexte où nous devons reparler de paix, d’absolution, de liberté et de respect absolu des droits fondamentaux, nous devons être très fiers d’être Catalans et de pouvoir l’exprimer librement chaque jour et dans le monde, devenant chaque jour un grand jour.
Très bonne fête nationale de la Catalogne.