Le confinement a été annoncé le 13 mars 2020, décrété le lendemain en Espagne. Le même jour, la Catalogne annonçait les fermetures de commerces, lieux de loisirs et recommandait aux habitants de rester chez eux. Les Français de Barcelone ont vécu ces journées entre bouleversement et incompréhension. Retour en arrière.
“Horrible, c’était le week-end de l’anniversaire de mon meilleur ami. On a eu trente personnes de Paris qui sont descendues pour le fêter et profiter de Barcelone » se souvient Thibault Leray. Tout était réservé : boîte, restaurant, bar privatisé. Le vendredi, tout a été annulé à la dernière minute. « On ne savait pas trop ce qu’il se passait”. Faute de pouvoir se rendre ailleurs, le groupe se retrouve dans un appartement. La soirée se solde par une plainte du voisinage à 22h, l’arrivée de la police et une amende. L’ambiance devient morose. “Tout le monde a dû prendre un billet d’avion en urgence samedi, de peur de rester bloqué en Espagne” ajoute-t-il.
D’autres Français ont dû vivre la situation inverse, comme Yann Silistrini. L’entrepreneur installé à Barcelone était parti avec des amis aux Deux Alpes en France pour le week-end. Réservation des forfaits, location du matériel de ski, rien ne manquait pour profiter des pistes durant la journée du samedi. Mais quelques heures plus tard, ils apprennent que tout doit fermer à minuit. Ils sont priés de repartir dès le dimanche. “Je suis rentré au plus vite à Barcelone car je craignais la fermeture de la frontière franco-espagnole” raconte Yann Silistrini. Ce week-end l’aura marqué, “c’était très particulier à vivre, surprenant et on ne pouvait pas imaginer ce qui allait se passer par la suite”.
Devenir parents
Pour certains expatriés, difficile de réaliser la situation, quand un événement parallèle se prépare à chambouler leur vie. “Mon accouchement déclenché était prévu le samedi 14 mars” raconte Crystel. La veille, la future maman et son compagnon Kévin préparent donc la valise, font des courses, sans regarder les mesures annoncées par le gouvernement. Dans leur bulle, le couple n’a pas le temps de s’en inquiéter. « À la maternité, on nous avait juste informé qu’il y aurait moins d’infirmières de nuit car elles étaient prises aux urgences, il y avait les gestes barrières, mais la situation semblait normale. J’ai pu accompagner Crystel » raconte Kévin.
Lorsque le couple entend les premiers applaudissements pour le personnel sanitaire, c’est l’incompréhension .“Je faisais la blague à nos familles en disant que c’était pour l’arrivée de Noah” raconte le Français en riant. Les files d’attente devant la pharmacie étonnent également. Crystel et Kévin découvriront finalement le confinement à la sortie de la maternité, le mardi. Cette semaine fut la première d’une longue série où il a fallu s’adapter, entre rendez-vous chez le pédiatre et grandes précautions.
« Ça ne durera que 15 jours »
Du côté d’Amandine Colin, une journée étrange s’annonçait. Le jeudi 12 mars, la Catalogne annonce la fermeture des écoles et universités pour freiner la propagation du Covid. “Ma fille était super contente” se remémore la Française. Le vendredi “nous avions prévu un spa avec mon mari, c’était un cadeau de Noël”. Mais en arrivant dans le quartier du Born, l’ambiance n’était pas au rendez-vous. “Beaucoup de rideaux étaient déjà baissés. Une amie devait nous rejoindre pour une dégustation de vin le soir, mais elle a eu peur et a préféré rester chez elle. Honnêtement je ne comprenais pas ce qu’il fallait faire, ce qui était autorisé ou non” poursuit la psychologue.
Comme pour de nombreux Barcelonais, l’incompréhension était le sentiment qui primait. “Le lendemain j’ai voulu emmener ma fille au parc, mais tout était barricadé, il n’y avait personne dans les rues. Je ressentais un mélange de sidération et de peur. Mais je me disais ce n’est que pour deux semaines” confie Amandine.
C’est aussi ce que pensait Pauline Lemoine Davoust. « J’étais dans un de mes bars favoris de Barceloneta. On a bu du vin jusqu’à la fermeture en discutant, des passants se baladaient, des enfants jouaient, c’était l’ambiance quotidienne et habituelle du quartier. Et on se disait quinze jours, ça va passer vite ».