Comment Barcelone défie le géant Amazon

À l’approche des fêtes de fin d’année, les commerces barcelonais s’organisent pour préparer au mieux les festivités. Mais, à l’heure de la Covid-19 et de son lot de restrictions préventives, le e-commerce, notamment le géant Amazon, en ressort grandi. Comment réagit Barcelone face à la société de Jeff Bezos ? 

« Il faut que les personnes prennent conscience que s’ils continuent à acheter uniquement sur Amazon, les petits commerces vont disparaître » déplore Montse Porta, gérante de la librairie française de Barcelone Jaimes. Depuis le confinement du printemps dernier, les petites boutiques de la ville peinent à sauver leur chiffre d’affaires. À l’aulne du Black Friday et de Noël, les commerces espèrent rattraper cette année semée d’embûches. Dès lors, des collectifs ont vu le jour dès le mois de mars pour suppléer l’absence physique de boutiques et assurer leurs ventes en ligne. C’est le cas du monde du livre. Pendant le confinement, l’initiative « Llibreries Obertes » (librairies ouvertes) a été mise en place à Barcelone. Il s’agit d’une grande base de données permettant aux utilisateurs de sélectionner un ouvrage et de pouvoir le récupérer dans la librairie de son choix, une fois le confinement fini.

À l’échelle nationale, le site Todos tus libros permet aussi d’assurer la vente en ligne des petites et grandes librairies. Malgré ces aides, les libraires et les commerces barcelonais en général ont vu leur chiffre d’affaires sombrer : « Entre janvier et juin 2020, la librairie Jaimes a observé une baisse de 60 % de son chiffre d’affaire par rapport à 2019, tandis qu’à la même période, les bénéfices d’Amazon augmentaient de 300 % «  évalue Montse Porta.

Amazon, ses conséquences en Catalogne

Souvent reprochée de mettre en péril les petits commerces, l’entreprise de Jeff Bezos reste l’une des boîtes les plus lucratives d’Espagne et celle qui créé le plus d’emplois. « Depuis 2011, Amazon a investi plus de 2.9 milliards d’euros en Espagne » rapporte Jaime Negredo, porte-parole national d’Amazon. « En 2020, le géant Américain a créé 2.000 postes supplémentaires dans toute la péninsule ibérique, pour atteindre un total de 9.000 salariés » poursuit-il.

Amazon BarceloneParmi ces 9.000 personnes, une majorité travaille en Catalogne dans les 3 centres logistiques de la région, El Prat, Martorelles et Castellbisbal. Sur les 9.000 petites et moyennes entreprises espagnoles qui vendent leurs produits sur Amazon, plus de 2.000 sont des PME basées en Catalogne, « ce qui fait de la Catalogne la région comptant le plus de PME présentes sur Amazon » souligne le porte-parole de l’entreprise. Les centres d’Amazon à Barcelone comprennent également un pôle de développement de logiciels qui emploie des ingénieurs, des développeurs, des data-scientifiques et des experts en apprentissage automatique et en stockage cloud.

En plus de créer de l’emploi en Catalogne, Amazon engendre d’importants bénéfices, qui ont fortement augmenté en période de confinement. Au troisième trimestre de l’année 2020, les bénéfices de la société américaine s’élèvent à hauteur de 6.3 milliards de dollars dans le monde et signent une augmentation de 37 % par rapport à 2019. Sur ces trois mois, le chiffre d’affaires total de l’entreprise est de plus de 96 milliards, rapporte La Vanguardia. Selon l’étude de Statista, si Amazon était un pays, il occuperait la 13e place mondiale en terme de PIB au cours de l’année 2019. Un chiffre plus haut que le PIB espagnol.

Comment Barcelone compte sauver les petits commerces ?

À l’instar d’Anne Hidalgo, maire de Paris, Ada Colau a appelé la semaine dernière les barcelonais à boycotter Amazon pour favoriser les petits commerces de la ville en cette période de Black Friday et Noël. « Ces plateformes de e-commerce ne paient pas d’impôts, et n’ont aucune valeur ajoutée dans notre ville » s’indigne Ada Colau. Un appel qui a rapidement fait réagir le géant américain. Il a notamment contredit l’affirmation de la maire de Barcelone au sujet des impôts et a également évoqué les contrats établis entre la mairie de Barcelone et Amazon. En effet, il existe plusieurs contrats que le conseil municipal dirigé par Colau a signés avec la société tels que les Marchés d’approvisionnement de Barcelone, la Fondation Julio Muñoz, le Consortium Localret et la Fondation de Navigation océanique de Barcelone.

En plus du boycott lancé par Ada Colau, certains commerçants de la capitale catalane s’organisent pour trouver des alternatives à Amazon. Dans le quartier de Sant Antoni, par exemple, l’association des voisins et des commerçants a mis en place, il y a quelques semaines, un système de livraisons solidaires pour les commerces et habitants du quartier.

Via l’application WhatsApp Business ou le site internet comproalbarri.com, une vingtaine de livreurs s’occupe des commandes des habitants de Sant Antoni, réalisées auprès des 250 commerçants du quartier. « Maintenant, nous souhaitons développer une application pour simplifier les commandes et faciliter le travail des livreurs, confie Rafael Martínez, membre de l’association de quartier à l’origine de l’initiative, et espérer pouvoir faire face à Amazon. »

Si le rythme économique n’évolue pas, la moitié des petites et moyennes entreprises de Catalogne risque de fermer. Selon le syndicat des PME catalanes Pimec, les fêtes de Noël détermineront la survie d’au moins 20% des commerces de la région. Mais les stigmates de la crise sont déjà présents à Barcelone : « En me promenant sur la Carrer Valencia, raconte Montse Porta, j’ai vu plus d’une dizaine de magasins à louer. Aussi bien des magasins historiques que de proximités, pas seulement touristiques. »

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