Depuis le début de la crise sanitaire, les touristes à Barcelone se font rares. Les logements touristiques sont moins fréquentés et trouvent une nouvelle dans le marché de la location longue durée. Comment cette reconversion bouscule le marché locatif de la ville ?
Après l’été meurtrier dû au Covid-19, les appartements détenant une licence touristique peinent à trouver de nouveaux résidents. D’après l’Association des Appartements Touristiques de Barcelone (APARTUR), la ville compte un total de 9 600 biens destinés aux touristes. Parmi eux, au moins 40 % des logements ont été transformés en location permanente. Constat corroboré par Beñat del Coso, le porte-parole de Idealista, entreprise spécialisée dans l’immobilier.
Le porte-parole explique que le manque de voyageurs a augmenté le nombre d’appartements vacants. Pour éviter les pertes économiques, les propriétaires ont opté pour des locations longues durées. Ainsi, un grand nombre de biens s’est accumulé. Les propriétaires souhaitant louer à tout prix, se doivent d’être les plus attractifs possible. Les spécialistes immobiliers ont alors observé une légère baisse des loyers. Avec la reconversion des biens touristiques, les prix tendent à diminuer davantage.
Plus d’offres immobilières pour des loyers moins chers
Selon l’association APARTUR, les quartiers qui concentraient le plus d’appartements touristiques voient leur demande de location résidentielle exploser. Déjà l’été dernier, le secteur Barceloneta, très prisé par les voyageurs a vu 145 nouvelles annonces postées entre le 6 et le 12 juillet, relaye le média catalan Betevé.
« J’ai des appartements à la location longue durée depuis plusieurs années mais, à cause de la reconversion des appartements touristiques, j’ai plus de mal à trouver de nouveaux locataires, déplore Alice (le prénom a été changé pour préserver son anonymat). J’ai donc baissé mes prix pour m’aligner avec ceux des nouveaux appartements mis sur le marché de la location permanente. Et puis, en cette période difficile, cela me paraît plus juste » poursuit-elle.
D’après Beñat del Coso, cette baisse des loyers s’est généralisée dans la capitale catalane et s’élève à hauteur de -10,7 %. Valérie Henrivaux, de l’équipe Acheter Malin Espagne le constate également : « J’ai dû diminuer d’environ 10 % le loyer de l’appartement que je loue. D’abord pour respecter l’indice imposé par la Loi des Baux Urbains (le Ley de Arrendamientos Urbanos) mais surtout pour m’adapter à la situation actuelle, qui complique la recherche de nouveaux locataires. » L’offre immobilière a augmenté, mais la demande n’a pas suivi. Elle s’est restreinte avec le départ de nombreux francophones et étrangers, qui composent une grande partie des clients de l’entreprise.
De nouveaux types de biens sont également plus recherchés depuis la fin du confinement. « Les potentiels locataires recherchent davantage de grands appartements avec de grandes terrasses, le confinement les a bel et bien marqué » remarque Valérie Henrivaux. « Quand un logement dispose d’une petite surface et d’un petit extérieur, les clients sont plus fébriles. Les louer devient plus compliqué. »
Plus de logements sociaux dans le marché de la location ?
Avec l’absence de touristes, la Mairie de Barcelone envisage de placer des appartements touristiques dans le parc locatif social. Néanmoins, à ce jour, le bilan reste très maigre, seulement 22 appartements touristiques figurent désormais dans l’offre de logements sociaux, soit 0,2 % des 9 600 biens, rapporte le journal El País.
Toutefois, le président de l’association APARTUR, Enrique Alcántara, se montre optimiste. « La seconde vague de coronavirus pourrait potentiellement faire augmenter le nombre de reconversions, en sachant que la mairie de la ville offre jusqu’à 1 200 euros par mois aux propriétaires pour une durée d’un à trois ans maximum » confie-t-il.
Malgré les aides attrayantes de la mairie de Barcelone, les propriétaires de logements touristiques hésitent encore à laisser leur appartement au sein du parc locatif social. Cependant, l’enquête menée par APARTUR montre, paradoxalement, que 65 % des biens touristiques de la ville, soit 5 900 sur 9 600, ont été loués. Les propriétaires préfèrent, pour le moment, louer leurs appartements soit, pour de courtes durées, allant tout de même jusqu’à 11 mois, soit pour un contrat longue durée, et délaissent l’offre des logements sociaux.
Le marché de l’immobilier parmi les plus touchés par la pandémie
Le secteur immobilier est l’un des plus touchés par la pandémie. Enrique Alcántara rappelle que l’immobilier, notamment lié au tourisme, représente 280 entreprises faisant travailler 5 000 salariés (entre administrations, commerces, entretien et nettoyage). « Ce secteur emploie un grand nombre de personnes. Avant la crise, l’activité y était très intense » explique Alcántara. « Désormais, la location touristique ne génère plus autant de revenus et met à mal tous les secteurs qui en dépendent » s’inquiète le président d’APARTUR.