Ils sont venus étudier à Barcelone pour quelques mois et ont vu leur séjour chamboulé par la crise sanitaire. Au lieu d’interrompre leur Erasmus, ces étudiants français ont décidé, parfois malgré eux, de rester vivre la quarantaine ici. Témoignages et conseils.
Photo de couverture: Aubin et deux de ses colocataires, confinés à Gràcia
«Je n’ai pas eu d’autre choix que de rester. La veille de mon retour en France, mon vol a été annulé». Clara, 25 ans, avait posé ses valises à Barcelone en septembre pour y terminer son master tourisme. Une semaine après la déclaration de l’état d’urgence en Espagne, elle a voulu regagner Marseille, sa ville d’origine, en vain: «la région proposait d’avancer les frais de rapatriement des étudiants à l’étranger, mais il n’y avait que des liaisons via Paris, c’était trop compliqué» confie-t-elle.
Au contraire, Aubin, 21 ans, a délibérément choisi de rester confiné à Barcelone. «J’avais encore l’espoir que la vie étudiante reprenne, pour finir mon année Erasmus en beauté». Malgré la déception, le Toulousain poursuit néanmoins son semestre dans l’atmosphère de la mobilité internationale. En colocation avec trois étudiants étrangers, « ça compense avec le fait qu’on ne puisse plus sortir: c’est comme si j’avais la continuité d’Erasmus dans mon foyer de confinement: mes colocs sont ma deuxième famille ».
Étudiants en détresse
«En Erasmus, tu dois réussir tes examens au même titre qu’en France, les passer en ligne en catalan est un véritable parcours du combattant» Nicolas, Erasmus originaire de Grenoble, est affilié à l’université Pompeu Fabra, où il étudie l’économie. Il est inquiet pour l’obtention de ses crédits, indispensables pour valider son année à l’étranger. «La fac a mis du temps à s’organiser, maintenant tous nos cours sont en vidéoconférence et on a beaucoup de travail d’un coup».
Le Grenoblois n’a pas pu rejoindre l’Hexagone pour la quarantaine. Il s’était engagé auprès de son propriétaire pour occuper l’appartement jusqu’en juin. Un accord verbal contre une caution en guise de contrat, comme il est de coutume de la part des sous-loueurs d’appartement. C’est aussi le cas de Clara: «je continue de payer mon loyer alors que je ne suis même pas chez moi, je ne voulais pas rester avec mes colocs en qui je n’ai plus confiance». Elle s’est réfugiée chez une amie française à Roquetes, au nord de la ville, « mieux vaut être confinée seule que mal accompagnée ».
Des dépenses inutiles alors que les étudiants ne profitent plus des réjouissances de leur échange. Beaucoup ne savent pas ce qu’il adviendra de leur bourse versée par l’Union européenne ou leur région. Effectivement, ceux ayant regagné la France et n’ayant plus de dépenses effectives à Barcelone pourraient être amenés à rembourser une partie. En revanche, les étudiants contraints de rester sur place à leurs frais pourront conserver leur bourse.
Coronerasmus
Après presque huit mois, la capitale catalane était devenue pour ces jeunes Français une seconde maison, leur terre d’accueil. Être aujourd’hui confinés dans la ville de leur échange, c’est une frustration: « Je n’aurais jamais pensé terminer ma mobilité en étant aussi immobile. Ce second semestre s’annonçait si bien, je m’étais fait des amis du monde entier: ils sont tous repartis » explique Aubin. « Barcelone s’offrait à nous, j’avais une liste énorme de choses à découvrir. Je devais aussi voyager aux Asturies, découvrir Madrid… » continue Clara.
Malheureusement, ni la Pompeu Fabra ni l’Université de Barcelone, où Aubin et Clara suivaient leurs cours, ne rouvriront avant septembre. « Globalement, nous ne sommes pas à plaindre même si on commence à devenir fou, car en tant qu’Erasmus, on était tout le temps dehors» conclut Aubin. Malgré ces derniers mois en quarantaine, les étudiants gardent le sourire et pensent déjà à la Barcelone de l’après-confinement.
Pour rester unis et s’entraider, le réseau d’étudiants Erasmus ESN aide les jeunes rencontrant des difficultés en temps de crise. Il a créé #ErasmusAtHome pour continuer les actions de volontariat en ligne.