Avec les mesures de confinement, les Français de Barcelone continuent à travailler. Leur quotidien se retrouve bousculé, que ce soit dans le secteur médical ou informatique, en passant par les centres d’appels ou compagnies aériennes. Tour d’horizon.
« Pour une première journée j’aurai préféré être dans l’entreprise, pour connaître mes collègues et le fonctionnement. C’est bizarre mais il faut s’adapter ». Ce lundi, Johana a commencé son nouvel emploi au sein d’une entreprise spécialisée dans le mariage. Mais c’est en télétravail que la Française a effectué son premier jour. « Je me sens plus en sécurité chez moi, j’ai une heure de trajet pour me rendre sur mon nouveau lieu de travail, les transports en commun sont des lieux propices à la propagation des microbes » confie-t-elle. Grâce à la vidéoconférence et une organisation bien ficelée, les journées se déroulent à peu près normalement. « L’interaction me manque. Quand la situation sera à nouveau normale, ça sera un nouveau début dans les bureaux ».
De nombreuses entreprises ont dû créer un groupe de crise pour gérer la situation, comme Computacenter Espagne, dont 560 personnes travaillent à Barcelone. Son directeur Christophe Charpentier explique que l’organisation s’est faite progressivement en fonction des restrictions annoncées par le gouvernement. « Ça a commencé par les mesures d’hygiène, puis avec la fermeture des écoles, il a fallu savoir quels employés pouvaient continuer à venir, certains ont préféré prendre des congés. Côté matériel, nous avons dû faire le point en amont afin que tout le monde soit équipé pour le télétravail. Dès lundi, les employés commençaient à repartir en taxi avec les ordinateurs. Le bien-être de chacun reste la priorité » raconte le Français. D’ici la fin de semaine, tous les salariés pourront travailler de chez eux. Un nouveau protocole de management à distance a été mis en place.
Un rythme effréné
La situation actuelle touche aussi le secteur médical. Depuis quelques jours, la clinique francophone Turo Park Dental & Medical Center reçoit uniquement les patients ayant des urgences. « Nous avons beaucoup de demandes d’informations. Les patients s’interrogent sur les risques de se déplacer pour leur santé. On doit également rappeler que nous ne sommes pas équipés pour dépister du coronavirus » déclare la docteure Madeleine Smit entre deux rendez-vous. La situation fut l’occasion pour le centre de santé de lancer sa plateforme sécurisée pour répondre à l’isolement des patients barcelonais. Grâce à la téléconsultation, les médecins peuvent rassurer et conseiller à distance. « Il faut voir le côté positif, ce fut l’opportunité pour nous de lancer en seulement trois jours un projet que nous avions depuis des années, mais qui n’était jamais notre priorité » se félicite la créatrice. « On fait également des consultations à domicile en cas de besoin. Même si on reçoit moins de patients au cabinet, nous travaillons autant » ajoute-t-elle.
D’autres entreprises doivent travailler plus qu’à leur habitude. « Nous multiplions actuellement par cinq notre activité. Mes commerciaux doivent se mettre à faire du service client pour répondre à tout le monde » raconte Nicolas Blasyk, directeur général de l’entreprise informatique spécialisée dans le stockage et l’échange de données NUUBB. « Nous avons dû gérer à la fois la mise en place du télétravail pour la plupart de nos employés, les outils pour travailler à distance et les conseils pour nos clients. Nous faisons beaucoup de vidéoconférences pour garder des liens » ajoute-t-il. Le chef d’entreprise avait anticipé la situation en annulant tous les déplacements en France depuis ces trois dernières semaines.
Il a fallu organiser les équipes pour respecter les mesures de confinement et prendre les précautions nécessaires pour les techniciens sur le terrain. « Nos deux ingénieurs sont toujours séparés, de cette façon si l’un d’eux est contaminé, l’autre sera toujours opérationnel. On analyse également les dépannages en amont afin d’éviter de prendre des risques inutiles. » Avec des journées interminables, Nicolas Blasyk se trouve dérouté « même en étant trois sur place, c’est l’effervescence dans notre bureau, alors que notre quartier à Glòries est désert ».
Chômage pour les compagnies aériennes
Pour Mélanie hôtesse de l’air, tout n’est pas rose. La jeune femme se retrouve certainement au chômage technique. « L’ambiance de mon dernier vol Barcelone – New York était assez relax, et pour autant, j’ai l’impression que nous faisions du rapatriement d’Américains, vers les États-Unis. Ils étaient plutôt soulagés. Beaucoup manquaient à l’appel, certainement des touristes européens. » Elle ajoute qu’à la descente de l’avion les passagers devaient remettre une déclaration signée de leur propre main, faisant état de leur statut médical et prise de température. À son retour à Barcelone, la trentenaire observe que les avions sont quasi vides et les arrivées des voyageurs moins contrôlées.
Habituée à faire le tour du monde, la Français avoue être anxieuse à l’idée de rester chez elle « mon corps au repos me remerciera d’avoir enfin une routine et je me rassure car ça permettra d’endiguer la pandémie » conclut-elle.