Non, Carles Puigdemont ne va pas aller vivre en France

Depuis le début du mois de décembre, une information circule dans la presse catalane et espagnole : Carles Puigdemont irait vivre à Perpignan, dans le sud de la France. L’information est fausse et Equinox explique pourquoi.  

Tout a commencé avec deux informations véridiques. Premièrement, Carles Puigdemont va probablement dans les prochaines semaines bénéficier d’une immunité parlementaire découlant de sa victoire aux élections européennes du 26 mai dernier. Deuxièmement, l’entité privée de Carles Puigdemont, le Conseil pour la République catalane, a ouvert une délégation à Perpignan. Avec ces deux nouvelles, certains journalistes et médias ont conclu un peu vite que l’ancien président déménageait en France.

L’immunité parlementaire de Carles Puigdemont

Le 19 décembre prochain, la justice européenne se penchera sur l’immunité parlementaire d’Oriol Junqueras, élu parlementaire européen le 26 mai dernier. Le chef de la gauche indépendantiste, ancien vice-président du gouvernement catalan, est en prison depuis novembre 2017 suite à la déclaration d’indépendance. Autorisé à se présenter aux élections européennes depuis sa cellule, Junqueras a été élu député avec 21% des suffrages en Catalogne. En revanche, il ne peut siéger à Bruxelles suite à une interdiction du Tribunal suprême. La Haute Cour espagnole a refusé une sortie de prison au chef d’ERC pour aller récupérer son PV administratif devant la commission électorale de Madrid.  Un document nécessaire pour devenir formellement député au parlement de Bruxelles.

S’estimant lésé, Junqueras a saisi le tribunal de justice de l’Union européenne. Le verdict doit tomber jeudi prochain, et la position de l’avocat de l’UE semble indiquer que la sentence penchera en faveur d’Oriol Junqueras. « L’acquisition du mandat parlementaire des députés européens ne résulte que du vote des électeurs et ne peut être subordonnée à l’accomplissement d’aucune formalité ultérieure », explique Maciej Szpunar avocat de l’Union européenne. Si Junqueras devient député, la jurisprudence s’appliquera quasi automatiquement à Carles Puigdemont, également élu le 26 mai dernier. Comme il n’a jamais été condamné, l’ancien président bénéficiera de l’immunité parlementaire. Ce qui en théorie empêchera un placement en garde à vue ou une détention dans l’ensemble des pays d’Europe.

Le conseil de la République

Simultanément, Júlia Taurinyà, journaliste à France 3 Perpignan est devenu présidente de la délégation du Conseil de la République dans sa ville. Le « consell per la República«  est une organisation dirigée par Puigdemont afin de promouvoir le mouvement indépendantiste.

Certains titres de presse ont couplé les deux informations pour faire naître une rumeur.

Tout a commencé le 1er décembre, quand le quotidien La Vanguardia publie un article d’analyse concernant l’immunité et laisse sous-entendre que Puigdemont pourrait se rapprocher de la Catalogne et « pourquoi pas à Perpignan » écrit la journaliste Isabel Garcia Palan. La spéculation est accompagnée d’une photo où l’on voit conjointement Carles Puigdemont et Júlia Taurinyà.

Ell Consell per la República de Puigdemont ya tiene delegación en la Catalunya Nord, con sede en Perpiñán, presidida por Sílvia Taurinyà. El 14 de noviembre firmaron un acuerdo de colaboración en Waterloo

Aujourd’hui, l’info est « confirmée » par le pure-player espagnol El Confidencial et reprise par El Diari de Girona. Le journal de Perpignan, l’Indépendant cite la nouvelle comme de la « politique fiction ».

Dans son long papier de 1.900 mots, le journaliste d’El Confidencial va jusqu’à affirmer que Puigdemont a trouvé un logement à Perpignan, le vieil appartement de Francesc Macià. Cet ancien président de la Catalogne, a lui aussi fui son pays dans les années 20, et a vécu une partie de son exil dans les Pyrénées-Orientales. Mais comme le fait remarquer le journaliste catalan et perpignanais Aleix Reynie, le président Macià n’a jamais eu de maison à Perpignan. Il logeait à l’Hôtel de France, près de la Préfecture.

Contactée par Equinox, Júlia Taurinyà affirme que « c’est une évidence que si Puigdemont peut circuler librement en Europe il viendra à Perpignan. Au moins pour un meeting mais pas pour y vivre ». La journaliste de France 3 explique que la délégation du Conseil de la République n’a pas pour but de faciliter son installation à Perpignan. « Ce sont d’anciens collègues journalistes du Punt Perpinyà, qui travaillaient avec le Punt Girona que dirigeait alors Carles Puigdemont, qui sont à l’origine de la délégation. Ils sont allés à Waterloo l’année dernière et l’idée est née de faire une délégation à Perpignan » explique Taurinyà. Il y aura d’autres ouvertures dans les territoires historiques de la Catalogne aux Îles Baléares et dans la communauté de Valence. « Mais la Catalogne Nord s’est imposée parce que c’est un lieu stratégique, avant-garde pour l’internationalisation et arrière-garde de la résistance à l’intérieur. On a démontré ici notre solidarité de manière claire depuis 2017″ se félicite la journaliste.

Contactés par Equinox, le Palau de la Generalitat de Barcelone et la délégation catalane de Bruxelles confirment également que Carles Puigdemont reste vivre à Waterloo.

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