La Catalogne, qui rêve d’obtenir son indépendance, regarde avec attention l’État d’Israël devenu souverain en 1948.
Le président catalan Jordi Pujol fut le premier à s’intéresser de près à l’État hébreu et effectuer un rapprochement. Homme d’histoire, emprisonné pendant la dictature pour défendre l’identité catalane, Pujol connait bien l’antisémitisme structurel du régime dirigé par le général Franco. Les Catalans étaient pendant la dictature surnommés « les Juifs de l’Espagne » et, comme les Basques, subissaient de plein fouet la répression du système dictatorial. Le contexte historique prédisposa donc le président nationaliste catalan Jordi Pujol a une entente plus que cordiale avec Israël.
Un homme allait donner corps au rapprochement: David Tennenbaum, un Juif originaire de Galice, qui s’est installé en Catalogne, devint entrepreneur et rencontra Florenci Pujol, le père de Jordi Pujol. L’intérêt du président Pujol pour Israël était si grand que Tennenbaum lui a recommandé la lecture du livre Der Judenstaat de Theodor Herzl et la biographie de Chaim Weizmann. Pujol a dévoré ces livres, qui eurent un impact profond sur sa manière de promouvoir le nationalisme catalan du futur. À l’instar des socialistes catalans en exil qui, dans les années 1950 et 1960, ont soutenu Israël et l’ont considéré comme un exemple socioculturel et économique à suivre .
Pujol a jugé essentiel que le futur du nationalisme catalan soit fondé sur la réactivation de sa culture, de sa langue et de son identité. Déjà en 1965, et en pleine clandestinité, Pujol écrivait un article intitulé « Israël » dans lequel il louait le fait que « les Juifs évoquent leur passé, leur histoire, leur langue, leur culture et leur religion pour créer et façonner un État, et que cela devrait être un exemple. «
La Catalogne soutient Israël
Le 10 juillet 1986, le président Pujol organisa un dîner avec le premier ambassadeur d’Israël en Espagne, Samuel Hadas, pour célébrer une exposition sur l’art israëlien. Un an plus tard, du 5 au 9 mai 1987, Jordi Pujol s’est rendu en Israël, lors d’un voyage officiel, accompagné d’une délégation de 90 personnes. Lors de cette visite, le président Pujol a cherché à démontrer que son administration était pro-israélienne. Pujol alla dans un sens complètement différent de celui du gouvernement espagnol. Depuis le rétablissement de la démocratie en 1978, l’État espagnol s’est affiché ouvertement comme pro-arabe et défendant à de nombreuses reprises la Palestine. En 1979, déjà le Premier ministre espagnol Suarez rencontra Yasser Arafat, alors considéré comme un terroriste par Israël.
Au cours de son mandat de 23 ans, Jordi Pujol s’est déplacé à trois reprises en Israël afin d’y promouvoir les investissements et le commerce catalan. Avec l’alternance politique, et l’arrivée de la gauche au pouvoir , la Generalitat s’éloigna d’Israël de 2002 à 2010. Avant de revenir, avec le dauphin de Jordi Pujol : Artur Mas.
Israël ne soutient pas l’indépendance de la Catalogne
En 2013, Artur Mas devenu président fut reçu officiellement à Jérusalem par le chef d’Etat Shimon Perez et déclara « comme en Israël, il existe en Catalogne un peuple déterminé à être libre. » Une phrase qui provoqua une grande tension au sein de la diplomatie espagnole. Benjamin Netanyahu, proche de l’ancien Premier ministre ultra-conservateur espagnol José María Aznar a maintenu une neutralité quand Artur Mas organisa la consultation populaire indépendantiste le 9 novembre 2014.
En 2017, une délégation des Mossos d’Esquadra, la police catalane a rencontré officiellement le service d’intelligence israélien du Mossad. A quelques semaines du référendum d’indépendance, les médias espagnols ont tiré la sonnette d’alarme : Israël pourrait collaborer pour maintenir en sécurité une Catalogne indépendante. Dans les faits, rien n’a jamais été prouvé ni démontré.
Un an plus tôt, Carles Puigdemont, alors président de la Generalitat, avait également rencontré en secret l’ambassadeur d’Israël Daniel Kutner, pour discuter du processus d’indépendance. Il n’a cependant reçu aucun soutien public de l’ambassadeur. « Israël ne s’immisce pas dans les affaires intérieures » fut la position officielle de l’état hébreu, qui n’a pas reconnu la Catalogne comme état souverain après la déclaration d’indépendance du 27 octobre 2017.