Les plus belles plages de la côte catalane disparaissent sous le béton

Le fléau du bétonnage de la côte catalane a commencé sous la dictature franquiste et s’est poursuivi avec frénésie pendant la bulle immobilière. En 2019 les projets de construction repartent de plus belle et mettent en danger les joyaux de la côte : Cadaquès, Cap de Creus, Selva del Mar, Begur et Palamos.

La côte méditerranéenne espagnole souffre d’un délire de bétonisation. Et la Catalogne est la plus touchée: 26,4% d’urbanisation, devant les 23,1% dans la région de Valence et 15,4% en Andalousie. Outre son impact sur la faune et la flore locales, l’urbanisation des sols rend aussi les habitants plus vulnérables aux inondations qui risquent de se multiplier avec le changement climatique, explique l’ONG Greenpeace.

Officiellement, ce bétonnage fou est la conséquence de la bulle immobilière des années 2000, qui par la suite a éclatée et plongé le pays dans une crise économique profonde. Durant ces années en or, les mairies de la côte et le gouvernement catalan ont fait couler le béton pour ériger en masse logements, hôtels et autres complexes de loisirs.

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Les pouvoirs publics ont-il tiré les conséquences de leurs actes en faisant amende honorable? Absolument pas. Rien que sur la Costa Brava, 30.000 habitations sont actuellement en projet de construction. De quoi faire entrer en panique les riverains qui se sont regroupés au sein du collectif « SOS Costa Brava ». Une association qui a mis la pression au gouvernement de Catalogne pour tenter de mettre fin à ce que les militants nomment « un attentat écologique ».

Dont acte, en début d’année le ministère de l’Aménagement du territoire catalan fut réceptif aux demandes des militants et décrétait un moratoire sur les nouveaux projets immobiliers à moins de 500 mètres du littoral. Les habitants ont poussé un ouf de soulagement. Mais de courte durée. Deux mois plus tard, douche froide :  la Generalitat a levé partiellement son propre moratoire en mars, et paradoxalement dans les endroits les plus charmants de la côte : Cadaquès, le petit village de pêcheurs au cœur du parc naturel du Cap de Creus, Selva del Mar, Begur et Palamos.

La commission d’urbanisme de Gérone, une délégation du gouvernement catalan, explique avoir revu sa position sur le moratoire après un examen technique plus approfondi. Les zones sont déjà assez sauvegardées par d’autres textes notamment le classement en zone protégée, estime-t-elle. Donc la Generalitat ne souhaite pas ajouter des restrictions supplémentaires. Ce qui dans les faits laisse une marge de manœuvre assez ample aux constructeurs pour relancer leur travaux.

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D’ailleurs les investisseurs n’ont pas la pudeur du langage du gouvernement catalan et explique très directement que le profit financier doit être une priorité.  « Les zones qui devaient être protégées l’étaient en raison de leur valeur historique et de leur richesse naturelle, mais ces endroits ont également un énorme potentiel d’investissement résidentiel haut de gamme et le moratoire empêchait d’en profiter » a déclaré Luis Gualtieri, le PDG de l’agence immobilière Oi Realtor, se félicitant de la nouvelle position de la Generalitat et de la suspension partielle du moratoire.

« Pour la levée du moratoire, la réalité de l’activité économique territoriale a primé sur la valeur historique et naturelle, des attraits qui poussent paradoxalement la convoitise croissante de la promotion immobilière de haut standing sur ces secteurs bien exposés » reconnait un constructeur français opérant sur la Costa Brava.

Saccage

A Aiguafreda près de Bégur, un des joyaux de la côte catalane,  un investisseur va bétonner un secteur de criques, de falaises et de pinèdes, pour construire 260 résidences secondaires. Le maire et les habitants protestent.

Les habitants veulent saisir la justice espérant que les fameux textes sur les zones protégées qu’invoque la Generalitat permettent aux tribunaux de considérer les nouvelles résidences comme des constructions illégales. Le problème c’est qu’une fois que les bâtiments sont construits, il est difficile de réussir à les faire ébouler. Le Tribunal suprême a ainsi ordonné en 2004 la destruction d’un monstre de 21 étages: l’hôtel El Algarrobico situé sur la côte andalouse. Depuis une quinzaine d’années, la verrue urbanistique est toujours présente face à la plage, à cause de la mauvaise volonté des constructeurs qui doivent détruire le bâtiment à leurs frais.

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