Instituteurs et professeurs du Lycée français de Barcelone (LFB) se mettent en grève ce mardi 19 mars pour interpeller élus et parents d’élèves sur les conséquences de la réforme des établissements français de l’étranger.
Après le lycée français de Madrid le 8 mars dernier, c’est au tour du plus grand établissement français de Barcelone de sortir les piquets de grève. Dans la ligne de mire des enseignants : la réforme de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE). En 2017, l’AEFE avait déjà subi une coupe budgétaire de 33 millions d’euros, provoquant la suppression de plus de 500 postes de professeurs résidents à travers le monde.
La députée des Français d’Espagne et de la péninsule ibérique Samantha Cazebonne (LREM) a été mandatée par le gouvernement pour étudier de nouvelles solutions afin de préserver l’avenir du réseau AEFE. L’ancienne directrice du Lycée français de Palma de Majorque a remis son rapport le mois dernier et préconise une série de mesures « indispensables si l’on ne veut pas voir ce modèle décliner ».
La recommandation du statut unique pour les enseignants, celui de détaché direct, est l’une des mesures qui inquiètent le plus professeurs et instituteurs. Selon les syndicats, si ce statut est appliqué, les enseignants titulaires de l’Education nationale perdront leurs droits à la retraite française, subiront une baisse de revenus et seront soumis à une certaine précarité malgré leur situation de fonctionnaire, tandis que leurs salaires seront complètement pris en charge par les établissements (actuellement entre 40 et 60% de la rémunération est assurée par l’AEFE).
Un établissement prestigieux
A Barcelone, le Lycée français, qui compte aujourd’hui 201 enseignants et près de 3000 élèves. est une véritable institution, aussi bien pour les expatriés que pour les locaux. Nombre des élites catalanes sont passées jadis par ses salles de classes et ses couloirs. Pour Emmanuelle Gauthier, enseignante au LFB, la situation est désormais préoccupante pour les professeurs mais aussi pour les familles. « Les frais de scolarité vont mécaniquement augmenter et la qualité de l’enseignement sera également impactée puisque les établissements auront moins de candidatures d’enseignants formés par l’Education nationale » explique-t-elle. Des perspectives peu engageantes pour les parents d’élèves qui déboursent déjà entre 5000 et 6000 euros par an et par enfant, en échange d’un enseignement dit d’excellence.
Les syndicats, français comme espagnols, représentés au LFB ont donc appelé à un débrayage commun mardi 19 mars. « Ce nouveau désengagement de l’Etat français nous mène vers la privatisation de l’établissement et affaiblit les liens qui nous lient au système français. Le LFB ne délivrera plus une « éducation à la française » mais une « éducation en français » qui pourra être particulièrement dommageable alors que la sélection post-bac issue de Parcoursup se fait de plus en plus dure » précise le communiqué.
A Madrid, des familles ont rejoint le mouvement et émis un communiqué commun avec les enseignants pour réclamer l’arrêt des suppressions de postes et de l’augmentation des frais de scolarité. A Barcelone, une rencontre est prévue mardi à 14h avec l’Association des Parents d’Élèves (APE) du LFB. Contactée par Equinox, Samantha Cazebonne n’a pas souhaité réagir à ce nouveau mouvement de grève, considérant que toutes les réponses à ces inquiétudes se trouvent dans son rapport de 330 pages et ses 147 recommandations.