A Barcelone, de nombreux couples mixtes ou familles franco-espagnoles élèvent leurs enfants en parlant plusieurs langues. Le bilinguisme fait l’objet de beaucoup de mythes et de préjugés.
La rédaction d’Equinox a rencontré Ferran Pons, docteur en psychologie et professeur au département développement cognitif et psychologie de l’éducation à l’Université de Barcelone, pour démêler le vrai du faux.
1 – Les bilingues ont une meilleure mémoire
VRAI. De manière générale les bilingues ont une activité cérébrale plus intense. Quand on parle espagnol, on bloque nos fonctions exécutives, c’est-à-dire tous nos automatismes de Français. Les bilingues effectuent constamment cet exercice. Cela conserverait la santé de leur cerveau et favoriserait une bonne mémoire, puisqu’il a été démontré qu’en moyenne les bilingues développent la maladie d’Alzheimer 4 ans plus tard que les monolingues.
2 – Les bilingues sont plus intelligents que la norme
FAUX. Ferran Pons explique que le bilinguisme est « un petit plus dans la vie », mais ne garantit absolument pas d’être plus intelligent ou plus ouvert. Paradoxalement, certaines études que le docteur invite à relativiser, affirment que les bilingues seraient des personnes plus ouvertes et généreuses.
Une expérience a même montré qu’un nouvel élève dans une école est mieux intégré par les enfants bilingues que par les autres (Bialystok & Senman, 2004; Goetz, 2003; Kovács, 2009).
3 – Les enfants bilingues sont plus lents dans leur développement intellectuel
FAUX. Beaucoup de parents barcelonais imaginent que leur enfant bilingue est perdu lorsqu’il mélange l’espagnol et le français. Or, des chercheurs comme Bosch & Sebastian-Galles, ont montré que dès l’âge de 4 mois un enfant bilingue peut faire la différence entre ses deux langues grâce à la variation de rythme et de son. Ce mélange de langues est seulement un mécanisme d’aide qui survient lorsque l’enfant ne se souvient pas immédiatement du mot nécessaire.
De même, si il est vrai que les enfants bilingues ont un vocabulaire plus réduit qu’un enfant monolingue au même âge, ce n’est pas le signe d’un retard intellectuel. Forcément, les enfants bilingues connaissent moins de mots en espagnol par exemple, mais en prenant en compte les deux langues, leur vocabulaire est aussi important. Et cette différence est vite compensée en grandissant.
4 – Inscrire son enfant dans une école française de Barcelone, une bonne idée
Ni FAUX, ni VRAI. Ferran Pons avertit sur le fait que le bilinguisme est le résultat d’une situation naturelle, et non pas la création des parents. En soit, inscrire son enfant au Lycée Français de Barcelone n’est pas une mauvaise idée mais ne garantit pas le bilinguisme. « Apprendre une langue n’est pas un apprentissage formel, comme les mathématiques » explique le professeur.
L’expert estime que l’apprentissage d’une langue ne doit pas être imposé, mais fondé sur la motivation. Celle de pouvoir communiquer, comprendre les conversations autour de soi. L’enfant apprend plus facilement et retient mieux quand c’est naturel, et non pas quand c’est imposé par les parents.
5 – Les bilingues ont une facilité à apprendre de nouvelles langues
FAUX. Cela n’a rien à voir. Le facteur clé, c’est la ressemblance entre les langues. Par exemple, un bilingue français-espagnol n’aura pas de difficultés à apprendre l’italien très proche de l’espagnol, mais cela ne l’aidera pas pour apprendre le coréen.
6 – Les enfants doivent apprendre le plus tôt possible une seconde langue
VRAI. Entre 0 et 3-4 ans, les enfants connaissent une période très fertile pour apprendre une langue, surtout si ils sont exposés très régulièrement aux sons, aux mots et à la grammaire de celle-ci. Après 12-13 ans, la langue maternelle étant déjà bien consolidée, il est plus difficile d’en apprendre une nouvelle.