La politique catalane va vivre au rythme du procès des leaders indépendantistes qui commence dans les prochaines semaines.
Les deux partis indépendantistes catalans, la gauche républicaine (ERC) et le parti démocrate (PDeCAT) gouvernent en coalition la Catalogne. Une alliance qui a de fortes chances de prendre fin, après le procès qui jugera les responsables catalans incarcérés depuis plus d’un an en détention préventive. Ce dernier devrait commencer au début du mois de février. Quant à la sentence, elle devrait être connue à l’automne prochain après de longues semaines de jugement. Lors du verdict, le président Quim Torra, pourrait dissoudre le parlement et convoquer des élections anticipées.
Rivalités
Tout oppose ERC et le PDeCAT qui gouvernent ensemble par la force des choses. Même la langue choisie pour répondre aux juges dans un procès, qui sera télévisé, n’est pas la même. Pour apparaître conciliateur et pouvoir répondre du tac au tac, les inculpés Oriol Junqueras (ancien vice-président) et Raül Romeva (ex ministre des Affaires étrangères) du parti ERC répondront en castillan. Pour garder une image de puristes, les anciens ministres Josep Rull, Jordi Turull et Joaquim Forn du parti de Carles Puigdemont répondront en catalan. Il faudra alors que leurs déclarations soient traduites en permanence par un interprète.
Les politiques actuellement détenus dans la prison catalane de Lledoners, seront transférés la semaine prochaine, dans un centre pénitencier de Madrid en vue du démarrage du procès.
De nombreux ministres de l’actuel gouvernement catalan seront présents à Madrid, où des manifestations sont prévues par les organisations indépendantistes pour protester.
Budget
Par ailleurs, le chef de la Generalitat demande que les députés indépendantistes qui siègent au Parlement national espagnol ne votent pas en faveur du budget général de l’Etat de 2019. Pour obtenir un suffrage favorable, le gouvernement socialiste de Pedro Sánchez sort le chéquier: 18% du budget total de l’Espagne sera investi en Catalogne pour les infrastructures et l’augmentation des politiques sociales.
Les souverainistes, tant du PDeCAT que d’ERC, annoncent publiquement qu’ils ne voteront pas le budget. Mais en coulisses, les choses sont plus nuancées et le suspense reste entier. Les voix indépendantistes sont primordiales pour obtenir une majorité parlementaire. En cas de rejet du budget, le Premier ministre pourrait convoquer des élections législatives anticipées. Un scrutin qui pourrait déboucher sur l’arrivée au pouvoir d’une coalition droite et extrême droite. Une droite musclée qui ne cache pas son envie d’enfin régler ses comptes avec les indépendantistes en suspendant de manière définitive l’autonomie politique de la Catalogne via l’article 155 de la constitution.
Un président fatigué
Le président catalan Quim Torra présente des signes de fatigue. Le chef du gouvernement annonce une crise politique si les indépendantistes votent le budget. Il serait fortement touché par la tentation de Venise. Quim Torra n’est pas un politique professionnel, il s’avère plus à l’aise dans les domaines culturels qu’à la tête de la Generalitat. Placé à la présidence par Carles Puigdemont, il est cependant peu plausible que Torra claque la porte avant la sentence du procès. Les députés indépendantistes d’ERC n’accepteront probablement pas d’investir un nouveau président. Selon la loi, ça serait à l’actuel vice-président d’occuper la présidence par intérim en attendant les élections, donc à Pere Aragonès d’ERC. Le parti PDeCAT de Carles Puigdemont perdrait alors la présidence qui est occupée par leur ami Quim Torra. Impensable.
Elsa Artadi à la mairie
Le blues de l’actuel président devrait encore monter d’un niveau avec le départ de la porte-parole du gouvernement Elsa Artadi. La trentenaire devrait démissionner avant la fin du mois pour se lancer dans la course à la mairie pour le PDeCAT, dont la tête de liste serait l’ancien ministre de l’Intérieur incarcéré Joaquim Forn. De fait, elle serait la candidate sur le terrain. L’actuelle porte-parole exprime encore quelques réserves avant de se lancer dans le bain des municipales. Cette proche d’Artur Mas vise la présidence de la Catalogne et un mauvais score aux élections de Barcelone pourrait refroidir sa carrière.
Le chemin est étroit dans l’électorat indépendantiste, avec la candidature d’Ernest Maragall pour ERC, Jordi Graupera de l’association ANC et l’extrême gauche de la CUP.
Quatre candidats devront se partager les 45% de la population que représente l’indépendantisme à Barcelone. Ada Colau et Manuel Valls sont en embuscade.