Le philosophe Voltaire n’opinait pas que sur le petit Paris qui pétille et la cour royale de Versailles. François-Marie Arouet avait son idée de la Catalogne, bien qu’il n’y posa jamais un pied.
Dans son ouvrage « Le siècle de Louis XIV » paru en 1751, le philosophe des Lumières connecté avec toute l’Europe clame que la « Catalogne est un des pays les plus fertiles de la terre, et des plus heureusement situés. Autant arrosé de belles rivières, de ruisseaux et de fontaines, que la vieille et la nouvelle Castille en sont dénuées, elle produit tout ce qui est nécessaire aux besoins de l’homme, et tout ce qui peut flatter ses désirs en arbres, en blés, en fruits, en légumes de toute espèce ».
Globalement sous la plume de Voltaire, la Catalogne est un ersatz du paradis sur terre. Le philosophe fait remarquer la richesse locale avec « Barcelone (qui) est un des beaux ports de l’Europe, et le pays fournit tout pour la construction des navires. Ses montagnes sont remplies de carrières de marbre, de jaspe, de cristal de roche ; on y trouve même beaucoup de pierres précieuses. Les mines de fer, d’étain, de plomb, d’alun, de vitriol, y sont abondantes : la côte orientale produit du corail. »
Finalement Voltaire est en exaltation quasiment indépendantiste devant « la Catalogne (qui) peut se passer de l’univers entier, et ses voisins ne peuvent se passer d’elle ».
Guerres et défaites
Sur le plan géopolitique, Voltaire semble apprécier un trait de caractère des Catalans. Quarante ans avant l’écriture de son livre, la France et l’Espagne s’étaient livré une violente guerre en raison de la succession de la couronne madrilène. La Catalogne, et surtout Barcelone, avait résisté face à un long siège avant de tomber entre les mains royales françaises. Un épisode qui n’a pas échappé à Voltaire : « Loin que l’abondance et les délices aient amolli les habitants, ils ont toujours été guerriers, et les montagnards surtout ont été féroces. »
Cependant lucide, Voltaire conclut sa démonstration par le fait que la Catalogne est connue pour perdre toutes les guerres : « malgré leur valeur et leur amour extrême pour la liberté, ils ont été subjugués dans tous les temps : les Romains, les Goths, les Vandales, les Sarrasins, les conquirent. »