Fille d’un célèbre artiste catalan et sœur d’un ancien Premier ministre français, Giovanna Valls n’a pourtant pas été épargnée par la vie. Portrait.
Giovanna Valls naît en 1963 à Paris, seize mois après son frère Manuel. Leur père, Xavier Valls, est un célèbre peintre catalan et leur mère, Luisangela Galfetti, est d’origine suisse et fille d’un architecte. Giovanna Valls grandira avec sa famille dans un appartement parisien, mais passe ses vacances dans une maison familiale à Barcelone. « Nous avons beaucoup de souvenirs dans le quartier d’Horta, c’est ici que nous jouions aux indiens et aux cow-boys » se souvenait-elle pour le journal El País il y a quelques années.
À l’âge de 20 ans, son enfance paisible semble lointaine. Elle découvre la drogue durant une soirée avec des amis dans la capitale française. Elle y prendra sa première trace d’héroïne, sans savoir ce que c’était. « Une rencontre qui détruira ma vie » racontera-t-elle dans une interview à l’agence de presse Efe en 2014. Rapidement, Giovanna Valls devient accro à l’héroïne. Sa famille fait le maximum pour l’aider à s’en sortir. En 1985, elle part vivre à Barcelone pour un sevrage. Loin de Paris, la jeune femme réussit à s’éloigner de la drogue, mais pas définitivement.
La descente aux enfers
Dix ans plus tard, elle replonge en raison d’une relation sentimentale avec un alcoolique. Elle arrête cette relation qui lui fera « beaucoup de mal », confiera-t-elle plus tard dans Le Télégramme, mais elle reste prise dans un engrenage. Un jour, la jeune femme se rend aux alentours de Barcelone, dans un endroit isolé converti en supermarchés de drogues. Elle y fera une overdose après un shoot de cocaïne et d’héroïne. Cinq années d’enfer suivront.
Au bout d’une semaine, elle est infectée par le VIH et par l’hépatite C. Giovanna Valls racontera au même journal qu’elle était devenue « une véritable junkie ». Elle vivait dans le quartier Can Tunis, qui a presque disparu aujourd’hui. Son quotidien se résumait à voler dans les magasins, pour revendre son butin et s’acheter de la drogue avec l’argent récolté. Elle avait besoin jusqu’à quinze doses par jour. Parfois, ses jours étaient rythmés par un passage en prison.
En 2004, Giovanna a 40 ans et pèse 35 kg. Les médecins ne lui donnent pas plus de deux semaines à vivre. Cette révélation fut le déclic: elle ne veut pas mourir et demande de l’aide à ses parents. Après plusieurs mois dans une clinique privée de Barcelone, elle part pour un centre en Amazonie au Brésil. Durant huit mois, elle suit un traitement à base d’ayahuasca. Elle effectue un véritable travail sur elle-même pour se libérer et l’écriture y contribuera beaucoup. Elle tient un journal intime et envoie des lettres à ses parents.
Confessions
Depuis 2007, elle vit à Barcelone dans la maison familiale, située dans une rue tranquille du quartier d’Horta. Un an plus tôt, elle prend la décision de raconter son combat dans un livre, où figureront des passages de son journal intime et ses correspondances avec ses parents. L’ouvrage sort en 2014 le jour de la Sant Jordi: « Accrochée à la vie. Journal d’une renaissance ». Un titre qui décrit parfaitement son récit intime et poignant. L’auteur se livre à travers des confessions saisissantes. On découvre les détails d’un parcours difficile, l’expérience d’une femme qui a vécu des moments obscurs avant de s’en sortir. Grâce à ce livre, Giovanna Valls révèle une réalité que certains ignorent et surtout donne de l’espoir: « je crois que ce livre peut aider beaucoup de personnes piégées et leurs proches » expliquait-elle.
Plus d’un ont été surpris de découvrir un tel parcours, de la soeur d’un homme politique qui deviendra Premier ministre en France. En plus de la promotion de son ouvrage, Giovanna Valls participe à des conférences en France et en Espagne sur la drogue pour sensibiliser au maximum à travers son expérience. Lors de ses différentes interventions dans les médias, elle affirme à plusieurs reprises que sa famille et son frère ont été d’un grand soutien pour elle.
Femme de caractère
Aujourd’hui, Giovanna Valls a 54 ans. Elle sera peut-être la soeur du futur maire de Barcelone au printemps prochain, si Manuel Valls se fait élire. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle ne mâche pas ses mots. Elle n’hésite pas à s’exprimer via son compte Twitter. Il y a un an, en plein processus indépendantiste, un échange de tweets entre Giovanna et Manuel avait fait le buzz. Alors que l’homme politique français, qui soutient l’unité de l’Espagne, demander le respect « de la réponse de l’Etat démocratique espagnol », Giovanna avait répondu en disant que l’application de l’article 155 n’était pas démocratique.
Alors que les médias s’intéressent à nouveau à elle depuis quelques semaines, Giovanna ne compte pas s’afficher pour autant. Toujours depuis Twitter, elle demande du respect et refuse de répondre à la presse. Elle affirme qu’elle sera d’un soutien sans faille pour Manuel Valls. Elle était présente le 25 septembre dernier lors de l’annonce de sa candidature au CCCB. Giovanna Valls devrait continuer d’apparaître aux côtés de son frère durant ces prochains mois.
Message à tous. Respect à tous les niveaux. Je ne dirai rien à la presse. #MONVIH respect. Je soutiendrai @manuelvalls quoique qu’il fasse. Les insultes et menaces restent, mais vous n’aurez pas ma peau.
— Giovanna Valls (@GiovannaValls) 22 septembre 2018
Porque lo vale y lo se. Porque es mi único hermano que he visto tantas veces. 16 meses nos separan y hemos crecido juntos. No dejaré de darle mi apoyo incondicional. ¡Carroñeros íros al infierno dónde hay carne podrida! pic.twitter.com/XEXQ20ZH4r
— Giovanna Valls (@GiovannaValls) 26 septembre 2018
Leslie Singla