Joaquim Torra, qui se soumet lundi 14 mai au second tour de son débat d’investiture pour prendre la succession de Carles Puigdemont, tente de séduire l’extrême-gauche.
Sur demande de Carles Puigdemont, le député Quim Torra se présente devant le parlement, après 5 mois de blocage suite aux élections législatives catalanes du 21 décembre. Le système électoral catalan est complexe. Les citoyens élisent des députés (le 21 décembre) qui à leur tour choisissent le président. Les indépendantistes sont majoritaires dans la chambre législative catalane : 70 députés contre 65 qui sont en faveur de l’unité de l’Espagne. Théoriquement le camp indépendantiste peut investir un président. Sauf que cette majorité est explosée en 3 groupes hétéroclites : le centre-droit de Puigdemont (34), la gauche républicaine (32) et l’extrême-gauche ultra-indépendantiste de La Cup (4). Si la gauche et la droite ont une alliance de gouvernement et forment un bloc de 66 parlementaires, l’extrême-gauche, elle, traîne des pieds et menace de voter contre la présidence Torra et ainsi de bloquer le parlement.
Samedi au parlement, dans un discours musclé, Quim Torra a sorti le grand jeu pour séduire la Cup : respecter le mandat du référendum du 1er octobre, implanter la République catalane et écrire une constitution pour la Catalogne indépendante. Le conflit avec Madrid repartirait de plus belle comme sous la présidence Puigdemont.
Blocage
Malgré tout, la Cup fait la fine bouche. Les anarchistes trouvent que le programme est trop à droite, pas assez indépendantiste, manquant de garanties réelles sur l’implantation concrète de la république catalane. Le mouvement fonctionnant en modèle représentatif, les militants de la Cup voteront dimanche après-midi pour décider quelle option leurs quatre députés devront choisir le lendemain.
Au regard de l’histoire récente, la Cup reste un partenaire compliqué et difficile à satisfaire. Certes, les anarchistes ont appuyé le référendum et la déclaration d’indépendance du 27 octobre en émettant de grandes réserves. Cependant, le certain nombre de fois où les anti-capitalistes ont dû prendre une décision capitale, ils se sont opposés au reste des indépendantistes. L’investiture d’Artur Mas en 2015, le vote du premier budget du gouvernement Puigdemont, la possibilité de convertir Jordi Turull en président catalan la veille de son incarcération, toutes ces tentatives se sont à chaque fois retrouvées bloquées par la Cup.
Soit l’extrême gauche votera en faveur de Quim Torra et les souverainistes relanceront la machine pour tenter de cheminer sur la route de la République catalane. Soit elle met en échec l’investiture de Quim Torra, et il sera temps de se demander si les anarchistes font partie de la majorité indépendantiste ou s’il faut les cataloguer dans un espace politique non identifié. En cas de non-investiture d’un président avant le 22 mai prochain, la loi prévoit que de nouvelles élections législatives soient convoquées le 15 juillet prochain. Il n’y aurait pas de gouvernement avant l’automne et la Catalogne resterait sous la tutelle du gouvernement espagnol avec l’article 155 qui resterait en vigueur. L’autonomie catalane politique est suspendue depuis la déclaration d’indépendance du 27 octobre dernier.