Le juge du Tribunal suprême a refusé hier la remise en liberté de l’ancien président de l’ANC Jordi Sanchez qui devait se présenter aujourd’hui au débat d’investiture à la présidence de la Catalogne. Le parlement réplique.
Énième session d’investiture convoquée par le parlement catalan et finalement annulée. Centre-treize jours après les élections remportées par une courte et bancale majorité indépendantiste (centre droit, centre gauche, anti-capitalistes), la Catalogne est toujours sans président, et donc sans gouvernement. Depuis la destitution de l’exécutif de Puigdemont fin octobre, elle est sous tutelle du gouvernement de Mariano Rajoy qui se charge des affaires courantes.
Mais sans gouvernement catalan, le nouveau budget ne peut pas être voté au parlement. Et les conséquences du blocage commencent à prendre d’importantes proportions, notamment dans les secteurs de la santé, de l’éducation et de la culture où toutes les nouvelles dépenses sont en attente. Pendant ce temps-là, l’horloge tourne : sans gouvernement au 22 mai, la dissolution du parlement provoquera automatiquement la convocation de nouvelles élections à la mi-juillet.
Trois investitures ratées
Arrivé en tête des suffrages côté indépendantistes, Carles Puigdemont était le candidat naturel à la présidence de la Catalogne. Problème : il est recherché par la justice espagnole, qui s’est opposée à son investiture. Le plan B était Jordi Sanchez, ancien président de l’association indépendantiste ANC, incarcéré à Madrid depuis six mois pour son rôle dans une manifestation qui avait empêché la police espagnole d’agir dans le cadre de l’enquête sur le référendum. Le juge en charge de l’affaire Pablo Llarena avait refusé de le remettre en liberté le temps de l’investiture.
Le plan C envisageait de propulser Jordi Turull, ancien porte-parole du gouvernement Puigdemont, à la présidence. Mais il n’a pas obtenu la majorité à cause des anti-capitalistes de la CUP et a été placé en détention provisoire pour risque de récidive par le même juge Llarena avant le deuxième tour du débat d’investiture.
Forts du soutien du comité des Droits de l’Homme de l’ONU qui a demandé à l’Espagne de respecter les droits civiques de Jordi Sanchez, les indépendantistes sont donc revenus cette semaine au plan B, réclamant une permission au juge Llarena pour le débat d’investiture convoqué ce vendredi. Nouveau refus du juge Llarena qui indique que « cet éventuel mandat peut mener à la rupture de l’ordre constitutionnel ».
Escalade judiciaire
Réuni ce matin en urgence, et à la place du débat d’investiture initialement prévu, le bureau du parlement a décidé de porter plainte contre le juge du Tribunal suprême pour prévarication (manquements aux devoirs de sa charge). La plainte serait présentée au nom des groupes parlementaires indépendantistes, et non de l’institution parlementaire, et pourrait s’étendre à l’ensemble des juges du tribunal visé.
Une annonce choc qui intervient dans une ambiance déjà tendue, et à 48 heures de la grande manifestation convoquée par l’ANC à Barcelone pour réclamer « droits, libertés et démocratie ».