Vers une augmentation des impôts en Catalogne?

Les indépendantistes au pouvoir préparent le budget de la Catalogne qui sera voté au parlement en novembre. L’extrême gauche, qui fait partie de la majorité indépendantiste, veut une augmentation massive de l’impôt sur le revenu, qui pour l’instant est refusée par le président catalan Carles Puigdemont. Cette crise pourrait provoquer de nouvelles élections.

Carles Puigdemont, le président de centre-droit indépendantiste, va présenter d’ici quelques jours les budgets de la Catalogne. Mais C. Puigdemont ne gouverne pas seul. Faute de majorité, il partage le pouvoir avec la gauche indépendantiste (ERC) et a besoin des votes des députés d’extrême-gauche séparatiste (La CUP) pour faire approuver son budget. La question d’une augmentation des impôts sur le revenu est devenue un préalable avant tout accord sur l’adoption du budget.

 ⇑ La position de l’extrême gauche : augmentation massive des impôts 

La Cup, qui permet avec ses 10 députés de maintenir en place le gouvernement indépendantiste, est un parti anti-capitaliste et altermondialiste. Il est donc naturel qu’il tente de défendre une hausse des impôts sur les plus hauts revenus. La proposition est de taxer plus fortement les foyers fiscaux qui dépassent les 60.000 euros bruts annuels. Le parti signale que seuls 4% des Catalans seraient concernés.

La Cup croit savoir que la majorité des citoyens seraient avec eux, selon une étude du Centre d’Estudis d’Opinió (CEO) qui révèle que 76% des Catalans seraient favorables à une augmentation des impôts pour les plus riches. Le petit parti souhaite également le rétablissement immédiat de l’impôt sur les droits de succession qui avait été aboli par Artur Mas en 2012. En revanche, il est favorable à une baisse des impôts sur les petits salaires.

⇔ La position de la gauche : augmentation modérée des impôts 

La gauche, qui gouverne la Catalogne en coalition avec la droite, proposait l’an dernier une mesure médiane entre celle de la droite et de l’extrême-gauche. Le ministre catalan de l’Économie souhaite reprendre la mesure de la Cup mais en fixant le barème à 90.000 euros brut annuels. On est alors très loin des 23.927 euros annuels que gagnent en moyenne les Catalans.

⇓ La position de la droite : aucune augmentation des impôts 

Le président Puigdemont et son parti PDEcat (l’ancienne Convergencia) est partisan du statu quo. Aucune augmentation d’impôts, ni sur le revenu, ni sur les droits de succession. En revanche, la droite est ouverte à la discussion sur une baisse d’impôts pour les petits revenus.

Vers une crise politique et de nouvelles élections ?

Le président Puigdemont n’avait déjà pas réussi à faire adopter les budgets de la Catalogne l’an dernier. Comme le prévoit la constitution espagnole, en cas d’absence d’accord sur le vote des budgets, ce sont ceux de l’an passé qui sont prolongés automatiquement. Les besoins et les dépenses des ministères évoluant constamment, ne pas pouvoir actualiser les budgets pose de sérieux problèmes de fonctionnement des services publics. Si pour la seconde année consécutive les budgets n’étaient votés pas par le parlement, la crise politique serait si importante que le président de la Catalogne a annoncé que des élections catalanes anticipées seraient organisées.

Sous la question budgétaire couve le débat indépendantiste catalan. Dans une partie de poker toujours plus incertaine, le président Puigdemont a annoncé la tenue d’un référendum sur l’indépendance de la Catalogne en septembre 2017. Il ajoute que si la Cup ne vote pas les budgets, de nouvelles élections se tiendraient et par conséquent le référendum serait annulé. La Cup voit rouge, hurle au chantage politique, et demande dans tous les cas, budget voté ou pas, que le référendum soit convoqué.

Pour se débarrasser de son encombrant allié anti-systéme, C. Puigdemont commence à tourner ses regards vers un autre groupe qui serait susceptible de voter les budgets : En Comú Podem. Le parti d’Ada Colau, qui regarde favorablement le processus indépendantiste, pourrait venir au secours de Puigdemont. Et pour forcer le bras de la maire de Barcelone, le parti de Carles Puigdemont a déjà sa petite idée.


Lire aussi : Ada Colau pourrait perdre la mairie de Barcelone


Ada Colau gouverne la mairie de Barcelone en minorité faute d’un nombre de conseillers municipaux suffisants. Les amis de Puigdemont ont fait savoir la semaine dernière qu’ils pourraient trouver une majorité alternative à Colau au conseil municipal de Barcelone et ainsi l’expulser de son siège de maire. Un coup de pression qui pourrait aider la cheffe locale de la gauche radicale à sortir Puigdemont de son impasse politique en appelant au vote du budget. Une stratégie qui doit être cependant relativisée par les calculs politique de la gauche d’ERC. Bien que ce parti indépendantiste gouverne en coalition avec la droite, dans le but d’emmener la Catalogne vers l’indépendance, il se dit dans ses couloirs qu’en cas de nouvelles élections, il n’y aura pas un nouvel accord droite/gauche mais une stratégie de se rapprocher des autres forces de gauche comme les socialistes catalans et En Comú Podem afin de mettre en place un gouvernement progressiste et social.

Budget, indépendantisme et machiavélisme, le triptyque catalan de cet automne promet d’être diabolique.

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