J’ai un faible, je l’avoue, pour le cinéma français. Il fait partie d’une éducation, d’une culture, et d’une proximité qui se situe dans une époque très précise : les dernières années du franquisme. La liberté d’alors, se situait de l’autre côté des Pyrénées à à peine 150 kilomètres de Barcelone. La liberté se traduisait dans les livres et les films qui ici étaient interdits. La liberté était dans les salles du Quartier latin de Paris ou à la Confrontation de Perpignan. Cinéma et histoire furent mes points de référence pour découvrir un art qui, dans mon cas, se lisait dans les magazines français « Positif » et « Ecran ».
J’ai écrit de nombreux livres sur le cinéma français, ce qui a fait surgir des amitiés personnelles avec Bertrand Tavernier, Costa-Gavras, Agnès Varda ou Robert Guediguian. Tous sont venus présenter leurs films au nouveau siège de la Filmoteca de Catalunya que je dirige depuis 2012 sur la base d’une programmation qui repose sur trois grands axes : le cinéma classique, le contemporain qui n’arrive pas sur nos écrans commerciaux et la collaboration transversale avec d’autres disciplines et institutions culturelles.
Et tout cela se retrouve dans le cinéma français, que ce soit au moyen de rétrospectives de classiques comme Jean Epstein, ou des avant-premières avec des moments si inoubliables que la projection de Adieu au langage de Godard en 3D , ou encore avec des expositions thématiques comme celle dédiée à Jacques Demy. Tout cela ne serait pas possible sans une parfaite syntonie avec l’Institut Français de Barcelone, en plus de celle que nous maintenons avec nos confrères dans la préservation du patrimoine : la Cinémathèque Française, la Cinémathèque de Toulouse et l’Institut Jean Vigo de Perpignan.
Ce n’est pas une coïncidence que cette affinité personnelle soit aussi un fait incontestable : la France possède une grande histoire cinématographique et c’est le paradigme de la résistance culturelle contre l’impérialisme des Majors. C’est un motif d’envie mais aussi un stimulant pour exposer son patrimoine et suivre son exemple.
Durant les prochains mois, donc, le cinéma français reviendra sur les écrans de la Filmoteca. Nous découvrirons la figure de Maurice Tourneur et nous rendrons hommage à Jacques Rivette –un des pères de la Nouvelle Vague- mais aussi nous laisserons s’infiltrer les films français dans nos cycles « Per amor a les arts », mais aussi dans notre salle de classe pour les étudiants universitaires ou les sessions pour les écoles. Il y a tellement de choses à apprendre, tant à profiter dans le cinéma français !
Esteve Riambau
Directeur de la Filmoteca de Catalunya