La France perd la Catalogne

La France perd le nord … de la Catalogne. Avec le redécoupage administratif des régions, le département des Pyrénées-Orientales pensait que la référence à Catalogne apparaîtrait dans la nouvelle appellation régionale. Il n’en fut rien mais les plus catalanistes ne s’avouent pas vaincus. 

Manifestations, réunions, pétitions, certains habitants du département des Pyrénées-Orientales ne décolèrent pas après que la Région Languedoc-Roussillon nouvellement baptisée Occitanie n’offre aucune mention à la Catalogne. Historiquement, la Catalogne unifiée allait de Tarragone (à une heure au sud de Barcelone) à Perpignan en France. En 1659, le traité des Pyrénées séparait définitivement la Catalogne française de sa sœur espagnole. Dès lors, les Catalans de France ont revendiqué une identité propre comme leur voisine. En toute logique historique, les catalanistes réclament que le département français numéro 66 porte le nom de « Catalogne » ou « Catalogne Nord ».

Jordi Vera est le responsable départemental de l’ancienne CDC, le parti d’Artur Mas qui possède une antenne à Perpignan. Pour ce Catalan du sud, qui a quitté l’Espagne en 1973 suite à une persécution politique, le combat pour changer le nom du département « est perdu d’avance ». Jordi Vera confie à la rédaction d’Equinox craindre que la défaite soit encore plus lourde dans 4 ans, quand le département sera supprimé dans le cadre de la réforme territoriale et que la Catalogne se retrouvera sans représentation institutionnelle. Pour ne pas en arriver là, il souhaite que la Catalogne soit reconnue dans une communauté administrative qui soit autonome de la région, semblable à la Corse ou au Pays Basque. Pour cela, il a lancé une pétition  « Oui au pays catalan » qui a déjà réuni 12 000 signatures.

Un coup d’épée dans l’eau, selon Brice Lafontaine. Ce Perpignanais partage le même objectif que Jordi Vera, faire reconnaître la Catalogne comme une communauté autonome, mais estime que la pétition « Oui au pays catalan » ne possède aucune base légale. Il ambitionne de récolter sur une nouvelle pétition plus de 30 000 signatures, légalement recueillies avec l’adresse des personnes et qui devrait permettre d’obliger le conseil départemental à organiser un référendum d’initiative populaire. La finalité est de contraindre le conseil départemental à saisir le conseil d’Etat afin de se diriger vers la reconnaissance institutionnelle du pays catalan. Les regards sont donc tournés vers Paris, suspecté de vouloir recentrer encore plus le pouvoir. Brice Lafontaine voit derrière le choix du nom de la nouvelle région « des consignes gouvernementales », glissant au passage à Equinox: « quil se dit d’ailleurs que le préfet de région aurait eu comme consigne de réclamer un nom qui ne reflète aucune identité catalane ».

La région défend son choix face aux catalanistes divisés

Le parti socialiste, qui est aux commandes du département et de la région, fait bloc derrière la présidente d’Occitanie Carole Delga. L’élue soutient mordicus son choix :« l’assemblée régionale a délibéré, le nom est Région Occitanie et il y a une signature qui est Pyrénées Méditerranée et qui regroupe le pays catalan ». Carole Delga insiste sur son « plan d’action pour le territoire catalan avec des actions fortes pour la culture catalane ». 

Une union socialiste qui fait rêver les catalanistes. Car Si Jordi Vera et Brice Lafontaine se vantent chacun de rassembler les troupes autour de leur personne, le mouvement est bel et bien divisé. « Ils ne sont là que pour justifier des places aux élections » estime Nicolas Caudeville. Pour ce journaliste perpignanais, fondateur du site L’archipel contre attaque, les deux leaders « étouffent le mouvement populaire en cherchant uniquement à passer dans les médias, pourquoi ne défendent-ils pas la culture, la langue, la gastronomie? » s’agace-t-il lorsque nous le contactons.

Pour lui, les catalanistes sont « les meilleurs alliés paradoxaux des Jacobins cherchant à recentrer tout le pouvoir à Paris ». « Ils se foutent du réel » s’enflamme le journaliste, qui critique pêle-mêle le fait que la radio locale publique France Bleu Roussillon ne porte pas non plus le nom « Catalogne » ou que la Sant Jordi de Perpignan ne présente pas de livres en catalan.

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Le catalan en pleine forme

Pourtant le catalan se porte bien à Perpignan et dans le département, avec un nombre record de 12 000 élèves qui apprennent la langue. Selon Jordi Vera , le « catalan retrouve ses lettres de noblesse, s’il y a quelques dizaines années la bourgeoisie perpignanaise a été la première à cesser de parler catalan pour passer au français, le prestige social est de retour. »

Selon le régionaliste, « la bourgeoisie locale de 2016 inculque le catalan à ses enfants, afin de pouvoir se rapprocher de la puissance catalane sud ». Jordi Vera affirme que « les notaires, avocats, banquiers perpignanais maîtrisent le catalan afin de pouvoir échanger pleinement avec la Catalogne espagnole, sûrs du fait qu’elle va devenir indépendante à terme ».

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