Nicolas Sarkozy et Artur Mas sont proches. Certes, leurs familles politiques respectives se sont séparées à cause de l’indépendantisme catalan, mais les deux leaders partagent désormais un nouveau point commun : l’irrésistible désir de revenir aux commandes du pouvoir.
Nicolas Sarkozy et Artur Mas sont les deux faces d’une même pièce de monnaie, bien rangée dans le portefeuille libéral européen. Le parti d’Artur Mas CDC, sur les plans économiques et sociétaux, peut facilement se placer sur la même ligne que Les Républicains de Nicolas Sarkozy.
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Lorsque qu’A. Mas a pris le contrôle du gouvernement de Catalogne en 2011, il s’est tout de suite déclaré « business friendly » et a entrepris toute une série de réformes libérales. Il a scandalisé la gauche en prenant exactement la même mesure que Nicolas Sarkozy en France quelques années plus tôt : supprimer les impôts lors des successions familiales. Au niveau de la stratégie politique, la ressemblance est frappante. N. Sarkozy a pratiqué la fameuse ouverture, visant à débaucher des personnalités de gauche comme Bernard Kouchner ou Eric Besson afin de les intégrer dans son gouvernement de droite. Artur Mas a fait la même chose en offrant au socialiste Ferran Mascarell le Ministère de la Culture au sein d’un gouvernement catalan de droite.
Les personnages Mas et Sarkozy ainsi que l’image qu’ils renvoient d’eux-mêmes ont par ailleurs de troublantes similitudes. L’image de girouette politique sans réelle conviction colle à la peau de ces deux leaders politiques. Partagé entre les liens privilégiés avec Madrid et l’indépendantisme pour l’un, changeant subitement d’opinion à la moindre enquête d’opinion pour l’autre, Artur Mas et Nicolas Sarkozy ont dérouté leurs électeurs.
Une sincérité remise en doute
Un nouveau lien unit le Français et le Catalan : le départ forcé du pouvoir et le désir inébranlable d’y revenir le plus rapidement possible. Pour N. Sarkozy, c’est l’échec à la présidentielle de 2012 qui l’a sorti du jeu politique. Pour Artur Mas, c’est l’échec des négociations avec les indépendantistes d’extrême gauche de la Cup qui l’ont obligé à quitter le devant de la scène.
Il est intéressant de noter que le côté « girouette » des personnages a participé à plus ou moins grande échelle au fracas. N. Sarkozy a exercé une fin de mandat et une campagne sur les thèmes de l’immigration et de l’identité nationale. Une idéologie qui aurait dû porter sur son nom au second tour une large majorité des 6 421 426 votants du Front National du premier tour. On sait qu’il n’en fut rien et que seulement une petite moitié des électeurs FN l’ont soutenu au second tour. Son absence d’idéologie véritable et son côté bateleur n’ont inspiré aucune confiance aux frontistes qui ont pensé que N. Sarkozy n’était que dans la posture de communication.
Il y a ici un véritable parallèle avec le parcours d’Artur Mas. L’ex-président de la Catalogne n’a jamais été spécialement indépendantiste tout au long de sa carrière. Il a fallu le raz-de-marée de citoyens catalans dans la rue en 2012, protestant contre la censure du nouveau statut d’autonomie de Catalogne, pour qu’Artur Mas devienne un indépendantiste zélé. Finalement son statut de nouveau converti lui a été fatal quand il a fallu obtenir le vote des députés indépendantistes d’extrême gauche de la CUP pour être investi président. Tout comme les électeurs du Front National qui doutaient de la sincérité patriotique de N. Sarkozy, les députés de la CUP ont douté de la sincérité indépendantiste d’A. Mas.
Revenir via le parti
Éliminés sur le fil, les deux anciens présidents n’ont maintenant qu’une seule obsession : retrouver le pouvoir perdu. Une fausse sortie caractérise les deux hommes. N. Sarkozy s’est retiré pour revenir quelques temps plus tard à la présidence de son parti dans le seul but de reconquérir l’Élysée. Artur Mas, quant à lui, s’évite la traversée complète du désert en ne lâchant pas les manettes de son parti mais manoeuvrant déjà pour retrouver sa place perdue de chef du gouvernement de Catalogne. Certains cadres de CDC ont d’ailleurs récemment confié au journal catalan Ara : « Artur Mas fera comme Nicolas Sarkozy, il va repenser idéologiquement le parti en vue du futur ».
Après avoir quitté l’Elysée, N. Sarkozy a repris l’UMP, a rénové le parti en changeant ses dirigeants et même le nom de la formation, devenue les Républicains. Artur Mas compte faire de même avec CDC : un nouveau parti encore plus tourné vers son chef, une regénération des responsables, et éventuellement un changement de nom afin de tourner définitivement la page de son fondateur Jordi Pujol, cerné par toute une série d’affaires de corruption et fraudes fiscales.
La seule inconnue : Artur Mas fera-t-il comme Nicolas Sarkozy et sortira-t-il un livre sous forme de mea culpa comme vient de le faire l’ex-président français?
#Bonus Track : Pour Equinox Radio Barcelone, Artur Mas parle en français de Nicolas Sarkozy
Le 15 octobre dernier, Artur Mas répondait en français à une question d’Equinox Radio en conférence de presse, après avoir été cité à comparaître devant la justice espagnole suite à l’organisation du référendum illégal du 9 novembre 2014. Il évoquait notamment le soutien apporté à Mariano Rajoy par son ancien allié Nicolas Sarkozy.