Souvent décrits comme des privilégiés, voire des exilés fiscaux, les expatriés français à Barcelone ne sont pourtant pas tous des nantis. Radiographie d’une communauté toujours plus diverse.
Conseiller en gestion de patrimoine, Nicolas Saignol le reconnait : ses clients sont parmi les plus fortunés des Français de Barcelone. « Les Français sont très appréciés dans les postes de top management des multinationales, ils sont assez convoités sur des positions de CEO ou DG, avec des revenus qui peuvent dépasser les 500.000 euros par an ». L’expert cite aussi les profils plus jeunes, entre 27 et 38 ans, travaillant dans des secteurs spécifiques comme la tech et des fonctions commerciales, et avec des salaires à 10.000 euros par mois, qu’ils peuvent presque doubler avec les primes. « Mais ce sont des profils assez rares, cantonnés à certains secteurs ».
Pour Pascal Bourbon, élu consulaire depuis 2014, le profil type de l’expatrié français à Barcelone a beaucoup évolué et ne correspond plus au cadre dirigeant envoyé par son entreprise de France ou d’Allemagne avec à la clé un gros salaire et de nombreux autres avantages. « L’expatriation s’est normalisée, notamment avec les voyages qui sont plus faciles, et les expériences Erasmus, c’est naturel de s’expatrier maintenant, alors qu’avant il fallait payer les gens pour qu’ils quittent la France ». Sur des destinations comme Barcelone en particulier, forte de son climat et son style de vie, les candidats sont devenus nombreux et acceptent désormais de bouger pour des salaires équivalents à ce qu’ils gagnent en France, voire inférieurs et plus alignés sur les salaires espagnols.
Même les cadres sont moins bien lotis qu’auparavant. « Il y a 10 ou 15 ans, c’était budget illimité, avec des loyers payés par l’entreprise atteignant les 10.000 euros mensuels, et maintenant c’est plutôt 5000 euros, ce qui est très bien, mais cela fait une grosse différence si on prend en compte aussi que les loyers ont augmenté de 50% en huit ans », explique Pascal Bourbon, également fondateur d’une agence de relocation, qui gère l’installation de dirigeants étrangers à Barcelone pour le compte d’entreprises.
Des revenus supérieurs aux locaux
Les expats restent toutefois sur des niveaux de revenus supérieurs aux locaux. Selon une étude de l’Université autonome de Barcelone et du Centre d’études démographiques publiée en avril, seuls 10% des expatriés européens gagnent moins de 1500 euros par mois (par rapport à presque 50% de la population espagnole). Un tiers gagne moins de 2000 euros et 20% des Européens installés à Barcelone gagnent plus de 4000 euros mensuels.
L’étude souligne aussi que les nouveaux arrivants paient souvent leur logement plus cher que les locaux ou les expatriés de longue date, à cause de la hausse globale des prix mais aussi de l’obligation, pour un tiers d’entre eux, de signer des baux temporaires non soumis à l’encadrement des loyers, faute de choix sur le marché locatif.
« C’est certain que le coût de la vie a beaucoup augmenté, s’expatrier de la France vers Barcelone n’est plus aussi intéressant qu’il y a 15 ans », conclut Pascal Bourbon. Pas de quoi décourager toutefois la nouvelle vague d’arrivants qui préparent cet été leur déménagement dans la cité catalane.