Economie collaborative – Les coursiers convoquent la première grève du secteur en Espagne

Après les polémiques Airbnb à Barcelone et le conflit entre Uber et chauffeurs de taxi dans toute l’Espagne, la grève des livreurs de Deliveroo ouvre une nouvelle brêche dans la si célébrée « nouvelle économie » ou « sharing economy ». 

Créée en 2013 au Royaume-Uni, Deliveroo promet de « livrer, chez vous, et dans les meilleurs délais, les plats de vos restaurants préférés ». Comment? « Dès que vous avez validé votre commande, l’un de nos super coursiers file la récupérer au restaurant » assure l’entreprise sur son site Internet. Active dans huit pays européens, dont la France, Deliveroo est entrée sur le marché espagnol en automne 2015 et opère aujourd’hui avec 1800 restaurants dans les plus grandes villes d’Espagne. Mais les super coursiers sont fatigués. Ils convoquent une grève dimanche 2 juillet entre 20h et 23h, l’un des pics d’activité hebdomadaire de l’entreprise.

En cause : l’organisation même de Deliveroo. Comme toute entreprise qui se réclame de l’économie collaborative, elle ne se présente que comme un intermédiaire entre le client et le livreur. Le coursier gagne le prix de la livraison, Deliveroo en garde 30%. Chaque course rapporte ainsi entre 3,38€ et 4,50€.  Ce n’est pas le tarif de la course qui est remis en cause puisqu’il est possible de faire plusieurs courses par heure, mais plutôt l’organisation de travail.

« Nouvelle économie » ou nouvelle précarité?

Deliveroo demande à ses coursiers une grande flexibilité, sans leur garantir un minimum de travail. Les livreurs proposent à l’entreprise des tranches horaires, et se doivent d’être entièrement disponibles sur ces franges, sous peine de sanctions. En réalité, il y a beaucoup de livreurs pour peu de tranches horaires dans la journée, c’est donc Deliveroo qui les assigne plus ou moins. L’entreprise impose également toute une liste de régles, qui la font davantage passer pour un employeur que pour un intermédiaire.


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Pour se défendre, les livreurs espagnols se sont donc organisés en créant la plateforme « Riders X Derechos ». Ils réclament notamment un minimum assuré de 20 heures de travail hebdomadaire et davantage de garanties. « Nous devons offrir à l’entreprise une disponibilité horaire sans avoir l’assurance d’être rémunérés, explique un porte-parole de la plateforme, et si on est malade, on ne peut plus travailler, et on n’a plus de salaire.. c’est un sacré recul des droits sociaux au XXIe siècle! »

deliveroo

« Deliveroo exploite – Grève 2 juillet » (photo Plataforma Riders X Derechos BCN)

 

Jusqu’ici, Deliveroo assurait un minimum de 2 courses par heure travaillée, et payait la différence si la promesse n’avait pas été honorée. Si un coursier travaillait 50 heures mais n’avait eu que 75 courses par exemple, il était payé pour 100 courses. Mais depuis la création de la plateforme syndicale, l’entreprise a décidé de renoncer à cet accord informel avec ses livreurs, qu’elle avait toujours formulé oralement.

Contactée suite au préavis de grève, la direction de Deliveroo affirme travailler avec plus de « 1000 coursiers dans toute l’Espagne, qui touchent plus de 10 euros de l’heure en moyenne » et annonce de nouveaux modèles de collaboration qui permettront aux livreurs d’augmenter leurs revenus. Mais « ce n’est pas assez » répondent les fondateurs de « Riders X Derechos » qui maintiendront donc leur grève à Barcelone, Madrid, Saragosse et Valence dimanche prochain.

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